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Page:Du halde description de la chine volume 3.djvu/129

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qu’il allait s’attirer l’indignation du prince, s’il persévérait dans son refus.

Il ne l’agréa pourtant qu’à condition qu’il ne travaillerait qu’à cette partie des mathématiques, qui concerne le cours des astres, les éclipses, et les vicissitudes des saisons, dont les règles sont certaines ; et il déclara à l’empereur que la science des Chinois était vaine et superstitieuse, lorsqu’ils prétendaient connaître par l’observation des astres, la différence des jours heureux ou malheureux, dont la nation est si fort entêtée.

La réforme du calendrier, et l’éclat que le père Adam donna au tribunal des mathématiques, lui affectionnèrent de plus en plus ce jeune prince : il allait souvent voir le Père dans sa maison, et en moins de deux ans il lui rendit jusqu’à vingt visites. Cette faveur était d’autant plus extraordinaire, que les empereurs chinois ne sortaient presque jamais de leur palais ; et qu’il n’y a point d’exemple, qu’ils se soient abaissés jusqu’à rendre visite à leurs sujets.

Un jour qu’on célébrait la fête de sa naissance, au lieu de recevoir sur son trône les hommages de toute sa cour, il passa le jour entier dans la maison du P. Adam. Une autrefois qu’il l’alla voir pendant l’hiver, il jugea qu’il n’était pas assez bien vêtu pour la saison ; et dépouillant sa propre veste, il lui en fit présent. Il ne l’appelait jamais que Ma fa, qui est un nom très honorable parmi les Tartares, et qui signifie ancien père.

Il ne se lassait point de faire son éloge. Il louait surtout son grand désintéressement. « Les mandarins, disait-il, ne m’aiment et ne me servent que par des vues intéressées : ils me demandent tous les jours des grâces nouvelles. Ma fa au contraire, qui sait que je l’aime, refuse continuellement celles que je le presse de recevoir. Il est trop content de mon amitié. »

Personne ne présente des requêtes à l’empereur, qu’elles ne passent par les mains du mandarin, qui préside au tribunal destiné à les examiner. Sa Majesté ne voulut point que le père Adam essuyât les formalités de ces tribunaux, peu favorables aux étrangers, et elle lui ordonna de s’adresser immédiatement à elle-même.

C’est en considération du même Père, que ce prince donna toujours aux prédicateurs de l’Évangile les plus grandes marques de son affection : il permit de bâtir deux églises à Peking, et de réparer toutes celles, qui, durant le temps des troubles, avaient été ruinées dans les provinces.

Le père Buglio et le père Magalhaens ayant été arrêtés dans la province de Se tchuen par les Tartares, et conduits dans les prisons de Peking, l’empereur les reçut avec bonté, comme les frères du Père Adam, et voulut même les loger dans l’enceinte de son palais. Mais les pères ayant refusé cet honneur, à cause des difficultés qu’ils auraient de remplir leur ministère, il leur acheta une maison dans la ville.

Le père Adam ayant informé ce prince que le père Martini était arrivé à Macao, avec un bon nombre de missionnaires qu’il avait amenés d’Europe, Sa Majesté leur fit expédier des patentes très honorables, par lesquelles elle les invitait de venir à sa cour, avec ordre aux mandarins de les