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Page:Du halde description de la chine volume 3.djvu/158

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religion chrétienne de religion fausse et dangereuse ; lorsque nous apprenons qu’il fait tous ses efforts pour la détruire ; comment pouvons-nous renfermer en nous-mêmes notre juste douleur, et ne pas déclarer à Votre Majesté ce que nous souffrons ?

« Ce n’est pas la première fois qu’on nous a persécuté sans raison. Autrefois le père Adam Schaal Votre sujet, comblé des faveurs extraordinaires de Votre prédécesseur, fit connaître à toute la cour, que les règles des mouvements célestes établies par les anciens astronomes chinois, étaient toutes fausses : il en proposa d’autres, qui s’accordaient parfaitement avec les astres : on les approuva, et on s’en servit avec succès ; de sorte que ce changement remit l’ordre dans l’empire. Votre Majesté sait ce qui se passa pour lors à Peking : il nous est permis aussi de nous en souvenir, puisque ce sont autant de grâces que nous y reçûmes.

« Mais à l’occasion de ces erreurs abolies, combien ce Père ne souffrit-il pas dans la suite par les calomnies de ses ennemis ? Yang quang sien, et ceux de sa faction, l’accusèrent faussement de plusieurs crimes, sous prétexte de nouveauté ; comme si la nouvelle astronomie n’eut pas été d’accord avec le ciel. Il mourut sans pouvoir alors se justifier ; mais Votre Majesté mit en sa place le père Verbiest, et le combla de tant de faveurs, que la vie de ce Père a été trop courte, et ses paroles trop faibles, pour marquer à tout le monde la grandeur de sa reconnaissance.

« Il a néanmoins ressenti vivement tous ces bienfaits ; et c’est pour n’être pas tout à fait ingrat, qu’il a employé plus de vingt ans à composer en langue chinoise toutes sortes de livres pour l’utilité publique, sur l’astronomie, l’arithmétique, la musique, la philosophie, qui sont encore dans le palais, avec plusieurs autres, auxquels il n’a pas eu le temps de mettre la dernière main.

« Mais, puisque Votre Majesté est parfaitement instruite de toutes ces particularités, nous n’osons pas la fatiguer davantage par un plus long discours. Nous la prions seulement de faire réflexion, que tout cela ne suffit pas pour nous attirer l’affection et la confiance des peuples. Si (comme on nous en accuse,) la loi que nous prêchons, est fausse et dangereuse, comment justifier la conduite des princes, qui nous ont honorés de leur estime ?

« Cependant, pour ne rien dire de Vos prédécesseurs, Votre Majesté Elle-même, a tellement compté sur notre fidélité, qu’Elle ordonna au père Verbiest de fondre des canons d’une nouvelle espèce, pour mettre fin à une dangereuse guerre. Elle fit traverser les vastes mers de l’océan au père Grimaldi, pour aller en Moscovie avec les lettres et le sceau du suprême tribunal de la milice. Elle a envoyé plusieurs fois pour des affaires importantes, les pères Pereyra et Gerbillon, à l’extrémité de la Tartarie. Néanmoins Votre Majesté sait bien, que ceux qui se gouvernent par les principes d’une fausse religion, n’ont pas accoutumé de servir leur prince avec fidélité : ils s’abandonnent