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Page:Du halde description de la chine volume 3.djvu/259

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fait faire, et qui la donnait. L’autre sens pouvait être : achevez le livre, on le reliera. C’était parler à celui qui devait recevoir la barque, le louer et l’exhorter à ne le pas démentir.

A cette inscription près, qui était d’une excellente main, la barque était simple et sans ornements. Le gouverneur l’envoyant à Tsao, lui fit dire qu’il l’avait fait faire telle exprès, pour lui ôter toute raison de la refuser. Tsao reçut la barque avec de grands témoignages de l’estime qu’il en faisait ; mais il résolut de ne s’en servir qu’en certains jours solennels, comme quand il irait rendre ses devoirs à ses ancêtres.


Autre exemple.


Li mien lin étant en charge, non seulement était fort désintéressé lui-même, mais il voulait aussi que ses gens le fussent. Lorsqu’il quitta sa charge pour se retirer chez lui, il craignit que quelqu’un de ses domestiques, n’ait pris ou reçu quelque chose à son insu. Quand tous se furent embarqués, il eût soin de les faire fouiller, et de faire publiquement jeter dans l’eau ce qu’il leur trouva : Canailles, leur dit-il, vous m’exposez à la risée de tout le monde ; on dira que j’ai pris par vos mains, n’osant prendre par moi-même.


Autre exemple.


Nien tsong allant être grand examinateur dans une province, fit rencontre en chemin d’un de ses intimes amis, qui l’arrêta pour délibérer avec lui sur des affaires importantes. Ils étaient logés dans une bonzerie. Un homme très riche de la province où Nien allait être examinateur, était aux aguets sur la route, et se trouva là. Il pria le chef des bonzes de porter pour lui la parole, et de promettre cinquante ouan[1], si on l’assurait du degré. Nien en souriant, dit au bonze : Faites venir ici cet homme, afin qu’il traite lui-même avec moi. Le bonze aussitôt l’appelle, croyant que tout allait bien. Mais d’aussi loin que Nien l’aperçut, sans lui donner le temps d’ouvrir la bouche : Ignorez-vous, lui cria-t-il d’un ton sévère, qu’étudier dès l’âge de trois ans, et sans relâche, c’est l’unique[2] voie pour parvenir aux degrés et aux charges de l’empire ? Prétendez-vous, paresseux que vous êtes, vous en ouvrir une autre à force d’argent ? Cet homme se retira tout confus, et Nien sur-le-champ prit congé de son ami.

  1. Un ouan, c’est dix mille onces d’argent. Cette somme paraît bien grosse : mais enfin je traduis comme il y a.
  2. On obtient quelquefois des charges, et même des degrés par argent ; mais lorsque la chose se découvre, le châtiment est très sévère. Il n’y a pas plus de deux ans qu’un grand examinateur de la province de Nan king, fut coupé par la moitié du corps, pour avoir été convaincu d’avoir vendu le degré de kiu gin à plusieurs personnes. Le tsong tou et le fou yuen, c’est-à-dire, les deux plus grands mandarins de la province, furent aussi cassés comme suspects d’être complices.