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Page:Du halde description de la chine volume 3.djvu/269

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fille du voisinage, pour servir d’une femme du second ordre à son mari. Sur la fin de l’année, temps ordinaire des vacances, le mari revenant à la maison, sa femme dressa une petite collation sur la table d’un appartement intérieur, où elle avait placé cette jeune fille, qu’elle avait fort proprement habillée. Ayant appelé son mari : Je suis désormais trop âgée, lui dit-elle, pour vous pouvoir donner des enfants. J’ai acheté cette jeune fille, qui est du voisinage et de ma connaissance. Elle est, comme vous voyez, assez bien faite, et a d’autres bonnes qualités ; prenez-la pour être votre femme du second ordre : peut-être empêcherez-vous par là votre famille de s’éteindre.

À ce discours, et plus encore à cette vue, le mari rougit, et baissa la tête sans dire un seul mot, la femme s’imagina que sa présence rendait son mari confus. Elle sort et enferme dans la chambre son mari et la jeune fille. Le mari qui voulut sortir aussi, trouvant la porte fermée, sauta par une fenêtre ; et allant trouver sa femme : Vous avez un bon cœur, lui dit-il, mes ancêtres et moi nous vous sommes fort obligés. Mais vous ne savez pas que cette fille étant encore petite, je l’ai souvent portée entre mes bras, et lui ai souhaité à chaque fois un mariage bien assorti. Je suis sur l’âge et assez infirme, je lui ferais tort de la prendre. Rendez-la vite à son père. On la rendit, et à la fin de l’année Kin eût de sa femme un fils, qui à l’âge de 17 ans obtint le degré de sieou tsai[1] ; l’année suivante, celui de kiu gin[2], et qui fut dans la suite un grand et fameux ministre.


Autre exemple.


Dans la révolte de Tchang lien tchang, un jeune étudiant nommé Ouang y tsin étant tombé entre les mains des rebelles, aperçut parmi ceux qu’ils avaient enlevés, la femme d’un autre jeune homme de sa connaissance. Sur le champ il va trouver le chef des rebelles, et lui dit : Monsieur, je trouve ici ma sœur ; je viens vous demander en grâce qu’elle ne soit point déshonorée : notre rançon ne tardera pas, je vous en réponds. Mais s’il arrive la moindre chose à ma sœur, nous ne pourrons, ni elle, ni moi, survivre à cet affront. Il dit ces paroles d’un ton et d’un air qui persuada l’officier. On le mit avec cette jeune femme dans une chambre qu’on leur donna pour prison. Ils y passèrent un mois et davantage, sans qu’il échappât à ce jeune homme, ni une parole, ni un geste, qui ne fut selon toutes les règles de la bienséance.


Médecin charitable.


Kin ko médecin de Chan yu joignait à une grande habileté un égal désintéressement et une charité peu commune. Qui que ce fût qui l’appelât, pauvre ou riche, il accourait aussitôt, quelque temps qu’il fît : c’était alors la coutume que les médecins de quelque réputation allassent en chaise,

  1. Bachelier.
  2. Licencié.