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Page:Du halde description de la chine volume 3.djvu/306

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Le gazouillement des oiseaux me vaut tous les instruments de musique ; et je préfère le coloris de certains nuages aux plus belles peintures du monde.


Fragilité de la vie.


Tsin hoang ti se flattait d’un règne de dix mille ans. Sin mang poussant plus loin ses espérances, fit faire son calendrier pour trente-six-mille. Ming ti de la dynastie Song se promit seulement trois cents ans de règne. Je ne mets cependant point de différence entre ces trois princes. Ils étaient également insensés. Un jour, ensuite un autre jour, disait le premier empereur des Han ; comment compter sur un grand nombre d’années ? Je n’oserais m’en promettre dix. C’est parler en sage prince.


Que la vertu doit être éprouvée.


Les montagnes et les plaines, quelque bon qu’en soit le terroir, ne portent point la belle fleur nommée Lien. Elle croît au contraire facilement dans des endroits bas et peu cultivés. Il en est ainsi de la vertu. C’est dans les épreuves, qu’elle fleurit. La vie de l’homme est un voyage. Il faut faire ce chemin tel qu’il puisse être. Il est rare qu’on le trouve égal ; si d’abord il est dangereux, étroit, et difficile, il y a lieu d’espérer que sur la fin il sera spacieux, sûr, et uni.


Bonheur d’une fortune médiocre.


Il en est à peu près de la vie des hommes, comme des fleurs d’un parterre. Communément les fleurs les plus belles sont aussi les plus délicates ; et certaines qui s’ouvrent avant les autres, tombent et se fanent bien plus tôt. Aussi les personnes intelligentes et qui ont une vraie prudence, préfèrent une condition honnête et médiocre, au brillant éclat de certains emplois.


Sur le même sujet.


Parmi les poésies de Tou tchao lin, il y a une chanson qui dit : Grands du monde, ne vous moquez point de ce pauvre paysan, qui n’a pour mettre son vin, que des vases grossiers de simple terre, et qui se verse lui-même à boire, pendant que vous buvez dans des vases d’or et d’argent, et que vous êtes servi par des valets en grand nombre. Après avoir bien bu chacun à votre manière, si vous vous trouvez tous deux ivres, vous vous endormirez sans façon auprès de lui sous un arbre. Le poète donne à entendre que c’est la même chose de boire dans des vases simples et de peu de prix, ou dans des coupes d’or et d’argent. Nous pouvons ajouter, suivant cette pensée, que dormir dans un lit de bois commun et sur des nattes, ou bien dans un lit de bois précieux, et sur un chevet de