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Page:Du halde description de la chine volume 3.djvu/339

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accusé d’une faute à l’égard de l’empereur régnant. Le prince le condamna, lui, et toute sa famille, à arroser des jardins le reste de leur vie. Pao yn, Grand de l’empire, et fort en crédit, dressa en faveur de Tien fuen une assez longue supplique, et la présenta à l’empereur, qui était alors Vou ti. Le mérite et les services de Tien fuen y étaient mis en un beau jour ; après quoi l’on y diminuait la faute, en disant que des envieux l’avaient fort envenimée. Malgré le crédit du suppliant, la supplique n’est point d’effet.

Kai koang yao, un des plus puissants hommes de son temps, parla mal de l’empereur, et en fit des plaintes. Suen ti l’ayant appris, s’en offensa, et témoigna le vouloir perdre. Aussitôt Tching tchang prend le pinceau, et dresse une remontrance : Prince, disait-il entr’autres choses, Koang yao est un homme dont le mérite et la puissance peuvent embarrasser Votre Majesté, si le chagrin était capable de lui en faire venir l’envie. S’il ne prend pas ce mauvais parti, et que Votre Majesté refuse de lui rendre sa bienveillance, je le connais ; il a trop de cœur, pour survivre à sa disgrâce. Il est de votre intérêt et de votre honneur d’user de quelque indulgence à son égard. Que n’a-t-il un autre Kiu fu ou un autre Kin tchang qui parle pour lui[1] ! Cette remontrance, au lieu d’apaiser Suen ti, ne fit qu’augmenter sa colère. Koang yao qui en eut avis, se coupa la gorge.

Sou tong po étant en prison pour quelque faute, Tchang ngan tao qui l’aimait et l’estimait fort, fit un écrit pour sa défense. Mais comme il était éloigné, il l’envoya à son fils Tchang chu, le chargeant de le faire passer à Sa Majesté. Cet écrit ne contenait guère autre chose, qu’un bel éloge de Sou tong po, qu’on y donnait pour le plus grand homme de l’empire, et le plus habile en tout genre. Tchang chu ayant reçu et lu cet écrit, fut embarrassé, et prit enfin le parti de le supprimer. Sou tong po peu après sortit d’affaire, et cet écrit lui fut montré. Il frémit en le lisant, et en devint tout pâle : puis revenant de ce trouble : J’étais perdu, s’écria-t-il, si l’écrit de Tchang ngan tao avait passé ; son fils m’a sauvé en le supprimant.

Quand donc vous intercédez pour quelqu’un, n’imitez pas ces exemples. Voyons-en de gens qui aient mieux réussi, pour s’y être pris d’une autre manière.


Moyen de fléchir la colère d’un prince.


L’empereur Mou tsong sortant un jour, un officier nommé Tchoui fa s’emporta, je ne sais pourquoi, jusqu’à frapper un des gardes qui accompagnaient Sa Majesté. Il fut aussitôt saisi et mis en prison. Lipai, Tchang tchong, Fang lun, tous Grands de l’empire, et aimés du prince, s’employèrent pour faire élargir Tchoui fa. Chacun d’eux dressa pour cela une longue requête. L’empereur les ayant lues, n’y eût point d’égard.

  1. Ces deux hommes avaient autrefois fléchi un prince en faveur de gens coupables.