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Page:Du halde description de la chine volume 3.djvu/365

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anciens livres, intitulé le Chu king. Yn, général des troupes de Tchong kang, parle ainsi :

« Il faut vous rapporter les belles instructions que nous a faites le grand Yu... Suivant ces instructions, les anciens princes qui ont donné la première forme à cet empire, n’ont eu un si heureux succès, que par ce qu’ils étaient attentifs aux volontés du Ciel, et qu’ils s’y conformaient dans leur conduite, les ministres qu’ils avaient auprès d’eux n’ayant d’autres vues que celles de la vertu. Nous voyons aujourd’hui Hi et Ho plongés dans le vin et la débauche, ne faire aucun cas de nos bonnes coutumes, et s’oublier entièrement de leur devoir. Le premier jour de la lune, qui était en même temps l’équinoxe d’automne, sur les huit heures du matin, il y a eu une éclipse du soleil hors la constellation Fang[1] ; et Hi et Ho font semblant de n’en rien savoir. Nos anciens empereurs punissaient sévèrement ceux qui étant chargés d’examiner les mouvements célestes, ne les avaient pas exactement prévus. Il est écrit dans les lois qu’ils nous ont laissées, que si le temps de quelque évènement céleste n’est pas bien marqué dans le calendrier, ou qu’on ne l’ait pas prévu, l’une et l’autre négligence doit être punie de mort. »

Il est aisé de voir qu’il faut que ces princes, qu’il appelle anciens, aient vécu longtemps avant Yao et Chun, dont il était contemporain. Si ces anciens empereurs avaient porté des lois si rigides contre les mathématiciens négligents, il fallait que l’empire fût déjà sur un bon pied. Cette éclipse a été vérifiée par plusieurs mathématiciens jésuites, et elle est telle qu’elle n’a pu paraître que dans les pays orientaux, et nullement en Europe, ni en Asie hors de la Chine.

L’exactitude avec laquelle Confucius a rapporté les éclipses dans son livre qui a pour titre Tchun tsiou, fait regretter ce qui s’est perdu en ce genre dans les commencements de l’ancienne histoire de cette nation, et fait connaître combien les Chinois ont toujours eu à cœur de tenir compte de ce qui pouvait assurer la postérité de la certitude des temps qui les avaient précédés.

De trente-six éclipses du soleil que Confucius rapporte, il n’y en a que quatre, dont deux sont fausses, et deux sont douteuses : toutes les autres sont sûres : elles ont été souvent vérifiées par les astronomes chinois sous les dynasties des Han, des Tang, et des Yuen.

Plusieurs Européens ne voulant s’en fier qu’à eux-mêmes, s’en sont assurés par leurs propres calculs. Le Père Adam Schaal a calculé et vérifié l’éclipse de Tchong kang, arrivée 2155 ans avant Jésus-Christ, et en a supputé plusieurs du Tchun tsiou, dont il fit imprimer le calcul en chinois.

Les Pères Kegler et Slavisek, jésuites allemands, ont aussi vérifié cette éclipse et plusieurs autres. Le Père Gaubil les a toutes examinées, et à quatre près, le calcul les a donné très réelles au temps et au jour marqué par les Chinois, de quelque table astronomique qu’il se soit servi.

L’observation de l’éclipse du soleil de l’an 2155 avant Jésus-Christ, se

  1. Le Scorpion.