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Page:Du halde description de la chine volume 3.djvu/382

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qui était de huit pieds cinq minutes et cinq secondes. Il tira aussi une ligne transversale sur la table de cuivre, pour marquer le terme de l’ombre, qui, selon la supputation qu’il avait faite, devait être de quinze pieds, huit pouces et trois minutes.

Les colao et les mandarins qui avaient assisté aux premières observations, furent aussi présents à celle-ci. A l’heure du midi l’ombre du style arriva justement à la ligne que le père avait tracée, et ses ennemis même, qui assistaient à tout par ordre de l’empereur, ne purent s’empêcher de lui rendre justice, et de louer la méthode européenne.

L’astronome mahométan dont j’ai parlé, n’avait pour toute connaissance du ciel, que de vieilles tables arabes qu’il avait reçues de ses ancêtres, et dont il suivait un peu l’usage. Cependant il travaillait depuis plus d’un an par ordre des régents de l’empire à la correction du calendrier chinois, qu’on savait assez n’être pas d’accord avec les phénomènes célestes.

Il avait déjà fait à sa façon et présenté à l’empereur en deux volumes ceux de l’année qui allait commencer. Le premier volume contenait les mois lunaires, les jours et les heures des nouvelles et pleines lunes de chaque mois, et les deux quadratures, le temps auquel le soleil se trouvait au commencement et au milieu de chaque signe, selon l’ancienne méthode de la Chine. On voyait dans le second volume le lieu des sept planètes qu’il avait calculé pour tous les jours de l’année, à peu près comme nous le voyons dans les éphémérides d’Argolus et des autres astronomes d’Europe.

L’empereur ayant été persuadé par les trois observations de l’ombre, que les calculs du P. Verbiest s’accordaient avec le ciel, lui ordonna d’examiner ces deux livres de l’astronome mahométan.

Il n’était pas difficile de trouver grand nombre de fautes dans ce nouveau calendrier. Car outre que les choses y étaient mal arrangées et plus mal calculées, il s’y trouvait des contradictions visibles. C’était un mélange de chinois et d’arabe, de sorte qu’on pouvait aussi bien le nommer un calendrier arabe que le calendrier chinois.

Le P. Verbiest fit un petit recueil où il marquait à chaque mois les erreurs les plus grossières du mahométan dans le cours des sept planètes, et il les mit toutes au bas de sa requête qui fut présentée à l’empereur. Sa Majesté convoqua aussitôt l’assemblée générale des Regulos ses parents, des mandarins de la première classe, des principaux officiers de tous les ordres et de tous les tribunaux de l’empire, et leur envoya la requête du Père, pour délibérer entre eux sur les résolutions qu’il fallait prendre. On n’avait jamais vu d’assemblée si considérable, ni si solennellement convoquée pour de simples affaires astronomiques, et l’on eût dit qu’il s’agissait de la conservation et du salut de tout l’empire.

L’empereur n’était pas encore sorti de minorité : mais sans rien témoigner au dehors, il nourrissait depuis longtemps une aversion secrète pour les gouverneurs que son père lui avait donnés. Ayant remarqué qu’ils