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Page:Du halde description de la chine volume 3.djvu/384

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chinois. La hauteur méridienne du soleil et la déclinaison qu’il avait ce jour-là, démontrèrent clairement qu’il le fallait.

Quant au lieu des autres planètes, comme il était nécessaire d’observer pendant la nuit, pour réfuter ce que le mahométan en avait écrit dans son calendrier, il crut qu’il ne le pourrait faire plus clairement et d’une manière plus sensible, qu’en proposant d’observer leurs distances des étoiles fixes. Il avait déjà supputé ces distances, et plusieurs jours auparavant, en présence de quelques mandarins, il avait marqué sur une carte du ciel dont il devait se servir, la distance où ces mêmes étoiles se trouveraient à l’heure que l’empereur avait déterminée. Il fit porter à l’Observatoire son quart de nonante, son demi-cercle, ses cartes, et tous les autres instruments qu’il crut propres pour cette observation.

Le jour marqué étant venu, on vit la cour partagée dans l’attente de ce que le Père avait promis. Sur le soir les colao, les mandarins, les mathématiciens des trois tribunaux, tant chinois que tartares, accoururent de tous les quartiers de la ville, ceux-ci accompagnés d’un grand cortège de gens à cheval, et ceux là dans leurs chaises portés sur les épaules de leurs valets.

Ayant vu clairement que de tout ce que le Père avait proposé, il n’y avait pas une seule chose qui ne fût conforme à ce qu’il avait prédit et supposé, ils furent convaincus par leurs propres yeux, que les calendriers tant chinois, qu’arabes, que le mathématicien mahométan avait présentés à l’empereur, étaient remplis de fautes, et ils allèrent aussitôt en informer Sa Majesté.

L’empereur ayant appris combien les observations du P. Verbiest avaient été justes et exactes, ordonna que l’affaire serait examinée dans son Conseil. Les deux astronomes dont on blâmait le calendrier, savoir Yang quang sien, et Uming huen, se trouvèrent, contre leur coutume, à l’assemblée, et par leurs brigues, en partagèrent les suffrages. Les mandarins qui étaient à la tête du Conseil, souffraient impatiemment que l’astronomie chinoise fut proscrite, et que celle d’Europe eût le dessus. Ils soutenaient qu’il était de la majesté de l’empire de ne rien changer à une science, dont toutes les nations avaient tiré jusqu’ici leurs lois, leur politique, et la sagesse de leur gouvernement ; qu’il valait mieux conserver l’ancienne astronomie qu’ils tenaient de leurs pères, quoiqu’un peu défectueuse, que d’en introduire une autre qui était étrangère. Ils donnaient aux deux astronomes la gloire de combattre pour leur patrie, et les regardaient comme les zélés défenseurs de la grandeur de leurs ancêtres.

Les principaux mandarins tartares étaient d’un sentiment tout opposé, et s’attachaient au sentiment de l’empereur, qui favorisait le pP. Verbiest. On disputa de part et d’autre avec beaucoup de véhémence. Enfin Yang quang sien, enflé de la protection des ministres d’État dont il s’était assuré, éleva la voix ; et s’adressant aux Tartares : « Si vous vous