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Page:Du halde description de la chine volume 3.djvu/385

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livrez à l’opinion de Ferdinand, leur dit-il, en recevant l’astronomie qu’il vous apporte, assurez-vous que l’empire des Tartares ne durera pas longtemps à la Chine. »

Un discours si téméraire fut reçu avec indignation des mandarins tartares, qui le rapportèrent aussitôt à l’empereur. Sa Majesté ordonna à l’instant qu’on chargeât Yang quang sien de chaînes, et qu’on le renfermât dans les prisons publiques.

Au même temps le P. Verbiest reçut ordre de réformer le calendrier, et l’astronomie de tout l’empire, et on lui donna la direction du tribunal des mathématiques. On voulut l’honorer de plusieurs autres titres, mais il les refusa constamment par quatre placets qu’il présenta à l’empereur.

Dès que le Père Verbiest se vit directeur du tribunal astronomique, il présenta un placet à l’empereur, où il lui fît connaître la nécessité de retrancher du calendrier de l’année courante la lune intercalaire qui y avait été introduite, et qui était contraire au cours du soleil : et comme les astronomes chinois avaient omis pour cette année la treizième lune, il fit voir que c’était une erreur inouïe, et que même selon leur calcul, la lune intercalaire appartenait à l’année suivante. Son placet fut renvoyé au Conseil privé. Les membres de ce Conseil regardèrent comme une chose bien triste, qu’il fallût ôter un mois entier du calendrier qui avait été reçu si solennellement. Comme ils n’osaient ni ne pouvaient contredire le Père Verbiest, ils prirent le parti de lui députer le premier président du Conseil.

Le mandarin abordant le Père avec un air honnête ; prenez garde, lui dit-il, à ce que vous faites. Vous allez nous couvrir de honte chez les nations voisines, qui suivent et respectent le calendrier chinois, lorsqu’elles apprendront qu’on s’est trompé si grossièrement, qu’il ait fallu retrancher un mois entier de l’année courante. Ne pourriez-vous pas dissimuler, ou trouver quelque moyen de sauver notre réputation ? Vous nous rendriez un grand service. Le père lui répondit qu’il n’avait pas le pouvoir d’ajuster le ciel à leur calendrier, et que c’était une nécessité indispensable de retrancher ce mois.

Aussitôt on publia un édit par tout l’empire, qui portait, que suivant la supputation astronomique du Père Verbiest, il fallait nécessairement ôter de l’année courante le mois intercalaire, et défense fut faite de le compter à l’avenir. Cet édit embarrassa fort ceux qui n’étaient pas au fait de l’astronomie. Ils ne pouvaient comprendre ce qu’était devenu ce mois qu’on avait retranché ; et ils se demandaient en quel lieu on l’avait mis en réserve.

Après avoir ainsi fixé l’année chinoise, et réglé le cours des astres, le Père s’appliqua à rétablir ce qu’il avait trouvé de défectueux dans les autres choses qui concernent le tribunal des mathématiques. Il songea principalement à enrichir l’observatoire de nouveaux instruments propres aux opérations astronomiques. Il les fit travailler avec un grand soin, et quelque admirables qu’ils parussent, les Chinois, toujours amateurs de l’antiquité,