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Page:Du halde description de la chine volume 3.djvu/495

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L’usage de la saignée est très rare parmi eux, quoiqu’on ne peut pas nier qu’ils en aient eu connaissance. Ce n’est que par les médecins de Macao qu’ils ont connu l’usage du lavement. Ils ne blâment pas ce remède ; mais parce qu’il leur est venu d’Europe, ils l’appellent le remède des barbares.

Toute leur science consiste dans la connaissance du pouls, et dans l’usage des simples qu’ils ont en quantité, et qui, selon eux, ont des vertus singulières, pour guérir les diverses maladies.

Ils prétendent connaître par les seuls battements du pouls quelle est la source du mal, et en quelle partie du corps il réside. En effet, ceux qui sont habiles, découvrent ou prédisent assez juste tous les symptômes d’une maladie ; et c’est là principalement ce qui a rendu les médecins chinois si célèbres dans le monde.

Quand ils sont appelés chez un malade, ils appuient d’abord son bras sur un oreiller. Ils appliquent ensuite les quatre doigts le long de l’artère, tantôt mollement, tantôt avec force. Ils sont un temps très considérable à examiner les battements, et à en démêler les différences, quelque imperceptibles qu’elles soient ; et selon le mouvement moins fréquent ou plus vite, plus plein ou plus faible, plus uniforme ou moins régulier, qu’ils observent avec la plus grande attention, ils découvrent la source du mal : de sorte que sans interroger le malade, ils lui disent en quelle partie du corps il sent de la douleur, ou à la tête, ou à l’estomac, ou au bas ventre, et si c’est le foie ou la rate qui soit attaqué : ils lui annoncent quand la tête sera plus libre, quand il recouvrera l’appétit, quand l’incommodité cessera.

Je parle des médecins habiles, et non pas de plusieurs autres qui n’exercent la médecine que pour avoir de quoi vivre, et qui n’ont ni étude ni expérience. Mais il est certain, et l’on ne peut en douter après tous les témoignages que l’on en a, que les médecins de la Chine ont acquis en cette matière des connaissances qui ont quelque chose d’extraordinaire et de surprenant.

Parmi plusieurs exemples qu’on pourrait citer, je n’en rapporterai qu’un exemple seul. Un missionnaire tomba dangereusement malade dans les prisons de Nan king. Les chrétiens qui se voyaient prêts de perdre leur pasteur, engagèrent un médecin de réputation à venir le visiter. Il se rendit à leurs instances, quoiqu’avec un peu de peine. Il vint dans la prison : après avoir bien considéré le malade, et lui avoir tâté le pouls avec les cérémonies ordinaires, il composa à l’instant trois médecines, qu’il lui ordonna de prendre ; l’une au matin, l’autre à une heure après midi, et la troisième sur le soir.

Le malade se trouva plus mal la nuit suivante ; il perdit la parole ; et on le crut mort : mais dès le grand matin il se fit un si grand changement, que le médecin lui ayant encore tâté le pouls, assura qu’il était guéri, et qu’il n’avait qu’à garder un certain régime durant sa convalescence ; et en effet il fut rétabli par ce moyen dans une santé parfaite.