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ASCANIO.

— Oh ! vous pouvez lui dire qu’il va très bien. Il s’est même levé tout à l’heure. Seulement, le chirurgien lui a défendu de sortir de sa chambre, et cependant cela lui ferait grand bien de prendre un peu l’air. Mais par ce soleil ardent c’est impossible. Votre jardin du Grand-Nesle est un véritable désert. Pas un coin d’ombre ; des orties et des ronces pour tout légume, et quatre ou cinq arbres sans feuilles pour toute verdure. C’est vaste, mais de bien peu d’agrément pour la promenade. Notre maître s’en console avec le jeu de paume ; mais mon pauvre Ascanio n’est guère en état de renvoyer une balle, et doit s’ennuyer à périr. Il est si vif, ce cher garçon, j’en parle comme ça parce que c’est mon favori, vu qu’il est toujours poli avec les gens d’âge. Ce n’est pas comme cet ours de Pagolo ou cette étourdie de Catherine.

— Et vous dites donc que ce pauvre jeune homme…

— Doit se manger l’âme d’être cloué des journées entières dans sa chambre sur un fauteuil.

— Mais, mon Dieu ! reprit la charitable dame Perrine, dites lui donc à ce pauvre jeune homme, de venir au Petit-Nesle, où il y a de si beaux ombrages. Je lui ouvrirai bien volontiers la porte, moi, quoique messire le prévôt l’ait expressément défendu. Mais bah ! pour faire du bien à son sauveur c’est vertu que de lui désobéir ; et puis vous parlez d’ennui ! c’est nous qui en desséchons. Le gentil apprenti nous distraira, il nous dira des histoires de son pays d’Italie, il nous montrera des colliers et des bracelets, il jasera avec Colombe. Les jeunes gens ça aime à se voir, à bavarder ensemble, et ça périt dans la solitude. Ainsi, c’est convenu, dites-lui, à votre Benjamin, qu’il est libre de venir se promener tant qu’il voudra, pourvu qu’il vienne seul