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ASCANIO.

— Et j’avais osé, madame, lui faire espérer qu’au besoin votre protection ne lui manquerait pas.

— Elle n’a jamais manqué à mes amis, dit la duchesse, et d’ailleurs, n’avez-vous pas pour vous une meilleure amie que moi, la justice ? N’agissez-vous pas en vertu des désirs du roi ?

— Sa Majesté, répondit Marmagne, n’a pas désigné elle-même l’hôtel de Nesle pour être occupé par un autre que ce Benvenuto, et notre choix, il ne faut pas se le dissimuler, aura tout l’air d’une vengeance. Et puis si, comme je le puis affirmer, car j’amènerai avec moi deux hommes sûrs, si je tue ce Cellini ?

— Oh ! mon Dieu ! dit la duchesse en montrant ses dents blanches en même temps que son sourire, le roi protège bien les vivans ; mais il se soucierait médiocrement, j’imagine, de venger les morts, et son admiration pour l’art n’ayant plus sur ce point à s’exercer, il ne se souviendrait plus, j’espère, que de son affection pour moi. Cet homme m’a si publiquement et affreusement insultée ! Marmagne, l’oubliez-vous ?

— Mais madame, dit le prudent vicomte, sachez bien nettement ce que vous aurez à défendre.

— Oh ! vous êtes parfaitement clair, vicomte.

— Non, si vous le permettez, madame, je ne veux rien vous laisser ignorer. Il se peut qu’avec ce diable d’homme la force échoue. Alors je vous avouerai que nous aurons recours à la ruse ; s’il échappait aux braves en plein jour dans son hôtel, ils le retrouveraient par hasard quelque soir dans une ruelle écartée et… ils n’ont pas seulement des épées, madame, ils ont des poignards.