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ASCANIO.

cela tout de suite ses excuses. Il faut qu’il sente un peu mieux son offense et notre courroux. Isabeau, dis-lui que tu m’as avertie et que j’ordonne qu’il attende.

Isabeau sortit.

— Je vous disais donc, vicomte de Marmagne, reprit la duchesse apportant déjà une certaine modification dans sa colère, que la chose dont vous m’entretenez était grave, et que je ne pouvais guère vous promettre de prêter les mains à ce qui est, après tout, un meurtre et un guet-apens.

— L’injure a été si éclatante ! hasarda le prévôt.

— La réparation, j’espère, ne le sera pas moins, messire. Ce redoutable orgueil, qui résistait à des souverains, attend là, dans mon antichambre, mon bon plaisir de femme, et deux heures de ce purgatoire expieront bien, à vrai dire, un mot d’impertinence. Il ne faut pas non plus être sans pitié, prévôt. Pardonnez-lui comme je lui pardonnerai dans deux heures : aurais-je sur vous moins de pouvoir que le roi n’en a sur moi ?

— Veuillez donc nous permettre, maintenant, madame, de prendre congé de vous, dit le prévôt en s’inclinant, car je ne voudrais pas faire à ma souveraine véritable une promesse que je ne tiendrais pas.

— Vous retirer ! oh ! non pas, dit la duchesse, qui voulait à toute force des témoins de son triomphe ; j’entends, messire le prévôt, que vous assistiez à l’humiliation de votre ennemi, et que nous soyons ainsi vengés du même coup. Je vous donne à vous et au vicomte ces deux heures : ne me remerciez pas. — On dit que vous mariez votre fille au comte d’Orbec, je crois ? — Beau parti, vraiment. Je dis beau, c’est bon que je devrais dire ; mais, messire, as-