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ASCANIO.

seyez-vous donc. Savez-vous que pour que ce mariage se fasse, il faut mon consentement, et vous ne l’avez pas demandé encore, mais je vous le donnerai. D’Orbec m’est aussi dévoué que vous. J’espère que nous allons enfin la voir et la posséder votre belle enfant, et que son mari ne sera pas assez malavisé pour ne pas la conduire à la cour. Comment l’appelez-vous, messire ?

— Colombe, madame.

— C’est un joli et doux nom. On dit que les noms ont une influence sur la destinée ; s’il en est ainsi, la pauvre enfant doit avoir le cœur tendre et souffrira. Eh bien ! Isabeau, qu’est-ce que c’est ?

— Rien, madame ; il a dit qu’il attendrait.

— Ah ! oui, fort bien, je n’y pensais déjà plus. Oui, oui, je le répète, prenez garde à Colombe, messire d’Estourville, le comte est un mari de la pâte du mien, ambitieux autant que le duc d’Étampes est cupide, et fort capable aussi d’échanger sa femme contre quelque duché. Alors, gare à moi aussi ! surtout si elle est aussi jolie qu’on le prétend ! Vous me la présenterez, n’est-ce pas, messire ? Il est juste que je puisse me mettre en état de défense.

La duchesse, radieuse dans l’attente de sa victoire, parla longtemps ainsi avec abandon, tandis que sa joie impatiente perçait dans ses moindres mouvemens.

— Allons ! dit-elle enfin, une demi-heure encore, et les deux heures seront écoulées ; on délivrera le pauvre Benvenuto de son supplice. Nous nous mettons à sa place, il doit horriblement souffrir ; il n’est pas habitué à de pareilles factions : pour lui le Louvre est toujours ouvert et le roi toujours visible. En vérité, bien qu’il l’ait mérité, je le plains. Il doit se ronger les poings, n’est-ce pas ? Et ne