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ASCANIO.

— Que j’étais trop jeune encore pour être à cette heure autre chose que ton amant, Scozzone. Nous reviendrons là-dessus plus tard.

— Et moi je ne suis plus assez niaise, monsieur, pour me contenter d’une promesse si vague et vous attendre toujours.

— Fais comme tu voudras, petite, et si tu es pressée, marche devant.

— Mais qu’avez-vous donc, après tout, contre le mariage ? Qu’est-ce que cela changera à votre existence ? Vous aurez fait le bonheur d’une pauvre fille qui vous aime, et voilà tout.

— Ce que cela changera à ma vie, Scozzone ? dit gravement Cellini. Tu vois cette chandelle dont la pâle lumière éclaire faiblement la vaste salle où nous sommes ; je pose un éteignoir sur la mèche, il fait tout à fait nuit maintenant. Le mariage, c’est cet éteignoir. Rallume la chandelle, Scozzone, je déteste l’obscurité.

— Je comprends, s’écria avec volubilité Scozzone éclatant en larmes, vous portez un nom trop illustre pour le donner à une fille de rien qui vous a donné son âme, sa vie, tout ce qu’elle avait, tout ce qu’elle pouvait donner, qui est prête à tout endurer pour vous, qui ne respire que par vous, qui n’aime que vous…

— Je sais cela, Scozzone, et je t’assure que je t’en suis on ne peut plus reconnaissant.

— Qui a accepté de bon cœur et égayé autant qu’elle a pu votre solitude, qui, vous sachant jaloux, ne regarde plus jamais les belles cavalcades d(archers et de sergens d’armes, qui a toujours fermé l’oreille aux doux propos qu’elle n’a cependant pas manqué d’entendre, même ici.