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ASCANIO.

continua l’inconnu passant du monologue au dialogue. Je parie ma bourse contre la vôtre, sans savoir ce qu’il y a dedans, cela m’est égal, que vous allez en bonne fortune. Oh ! ne me dites rien, soyez discret en amour, c’est un devoir. Quant à moi, mon nom est Jacques Aubry ; mon état, écolier, et je m’en vais de ce pas à un rendez-vous avec mon amante, Gervaise Philipot, une jolie fille, mais entre nous d’une vertu bien terrible, mais qui cependant a fait naufrage devant une bague ; il est vrai que cette bague était un joyau, un joyau d’un merveilleux travail, une ciselure de Benvenuto Cellini, rien que cela !

Jusque-là, le vicomte de Marmagne avait à peine écouté les confidences de l’impertinent discoureur, et s’était bien gardé de lui répondre. Mais au nom de Benvenuto Cellini toute son attention se réveilla.

— Une ciselure de Benvenuto Cellini ! Diable ! C’est un présent un peu bien royal pour un écolier.

— Oh ! vous comprenez, mon cher baron… Êtes-vous baron, comte ou vicomte ?

— Vicomte, dit Marmagne en se mordant les lèvres de l’impertinente familiarité que l’écolier se permettait avec lui, mais voulant savoir s’il ne pourrait pas en tirer quelque chose.

— Vous comprenez bien, mon cher vicomte, que je ne l’ai pas acheté. Non, quoique artiste, je ne mets pas mon argent à ces bagatelles. C’est Benvenuto qui m’en a gratifié en remercîment de ce que je lui ai donné un coup de main dimanche dernier pour enlever le Grand-Nesle au prévôt.

— Ainsi, vous êtes l’ami de Cellini ? demanda Marmagne.