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Page:Dumas - La salle d'armes 2 Pascal Bruno, Dumont, 1838.djvu/128

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LA SALLE D’ARMES.

compléter mon itinéraire. Il ne faut pas demander comment fut reçu dans notre réunion tout artistique, où souvent le fleuret n’était qu’un prétexte emprunté par la plume ou le pinceau, l’auteur de la Somnambule et de la Norma. Bellini était de Catane : la première chose qu’avaient vue ses yeux en s’ouvrant étaient ces flots qui, après avoir baigné les murs d’Athènes, viennent mourir mélodieusement aux rivages d’une autre Grèce, et cet Etna fabuleux et antique, aux flancs duquel vivent encore, après dix-huit cents ans, la mythologie d’Ovide et les récits de Virgile ; aussi Bellini était-il une des natures les plus poétiques qu’il fût possible de rencontrer ; son talent même, qu’il faut apprécier avec le sentiment et non juger avec la science, n’est qu’un chant éternel, doux et mélancolique comme un souvenir, un écho pareil à celui qui dort dans les bois et les montagnes, et qui murmure à peine tant que ne le vient pas l’éveiller le cri des passions et de la douleur. Bellini était donc l’homme qu’il me fallait : il avait quitté la Sicile jeune encore, de sorte qu’il lui était resté de son île natale