Aller au contenu

Page:Dumas - La salle d'armes 2 Pascal Bruno, Dumont, 1838.djvu/216

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

dues sur la première somme qu’il enlèverait au trésor royal.

Le prince de Butera était un de ces types comme il n’en existe plus guère dans nos époques modernes : c’était un reste de la vieille seigneurie sicilienne, aventureuse et chevaleresque comme ces Normands qui ont fondé leur constitution et leur société. Il s’appelait Hercule, et semblait taillé sur le modèle de son antique patron. Il assommait un cheval rétif d’un coup de poing, brisait sur son genou une barre de fer d’un demi-pouce d’épaisseur et tordait une piastre. Un événement où il avait fait preuve d’un grand sang-froid l’avait rendu l’idole du peuple de Palerme : en 1770, le pain avait manqué dans la ville, une émeute s’en était suivie ; le gouverneur en avait appelé à l’ultima ratio, le canon était braqué dans la rue de Tolède, le peuple marchait sur le canon, et l’artilleur, la mèche à la main, allait tirer sur le peuple, lorsque le prince de Butera alla s’asseoir sur la bouche de la pièce, comme il aurait fait sur un fauteuil, et de là commença un discours tellement éloquent et