Aller au contenu

Page:Dumas - La salle d'armes 2 Pascal Bruno, Dumont, 1838.djvu/338

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Pascal frissonna sans savoir pourquoi ; il chercha les traits du visage[1] de cette femme, mais un coin du linceul était retombé sur sa figure et la voilait. Tout-à-coup un souvenir instinctif lui rappela Teresa, Teresa qu’il n’avait pas vue depuis le jour où il avait rompu avec les hommes et avec Dieu, Teresa qui était devenue folle, et qui depuis trois ans habitait la maison des aliénés, d’où sortaient cette bière et ce cadavre ; Teresa, sa fiancée, avec laquelle il se retrouvait peut-être au pied de l’autel, où il avait espéré si long-temps la conduire, et où ils venaient enfin, par une amère dérision de la destinée, se rejoindre, elle morte et lui près de mourir. Un plus long doute lui fut insupportable, il s’avança vers le cercueil pour s’assurer de la réalité ; mais tout à-coup il se sentit arrêter par le milieu du corps, c’était sa chaîne qui n’était point assez longue pour qu’il pût atteindre le cadavre, et qui le retenait scellé à son pilier ; il étendit les bras

  1. En Italie on expose les morts à visage découvert ; ce n’est qu’au moment de descendre le cadavre en terre qu’on cloue le couvercle du cercueil.