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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

— Eh bien, général ; elle m’a quitté, la vieille taupe. Il parait qu’elle n’avait de pouvoir que dans le canton[1].

Maintenant, le lecteur a le droit de me demander une explication sur le post-scriptum de mon père ; et d’exiger que je lui dise ce que c’était que ce Berlick qui grandissait d’un pouce par mois, et qui courait sur la pointe des pieds sans que les sabots y fissent rien.


XVIII


Ce que c’était que Berlick. — La fête de Villers-Cotterets. — Faust et Polichinelle. — Les sabots. — Voyage à Paris. — Dollé. — Manette. — La pension de madame de Mauclerc. — Madame de Montesson. — Paul et Virginie. — Madame de Saint-Aubin.

Berlick, c’était moi.

Voici à quelle circonstance je devais ce charmant sobriquet :

Pendant la grossesse de ma mère, avait eu lieu, comme d’habitude, le jour de la Pentecôte, la fête de Villers-Cotterets ; fête charmante, sur laquelle je reviendrai, qui se passe sous les feuillées nouvelles, au milieu des fleurs qui s’ouvrent, des papillons qui voltigent, des fauvettes qui chantent, fête qui autrefois avait sa réputation ; fête à laquelle on venait de vingt lieues à la ronde, et qui, comme toutes les fêtes, à commencer par la Fête-Dieu, n’existe plus guère que sur le calendrier.

Donc, à cette fête où venait tant de monde, était venu un homme portant sur son dos une baraque comme l’escargot porte sa coquille.

Cette baraque contenait le spectacle essentiellement national de Polichinelle, spectacle auquel Goethe a emprunté son drame de Faust.

En effet, qu’est-ce que Polichinelle ? Un libertin usé, blasé, rusé, qui enlève les femmes, qui bafoué les frères et les ma-

  1. Voir, pour le développement de l’histoire de Mocquet, un Voyage à la lune, dans le tome deuxième des Causeries.