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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

Par un miracle, mon père ne paya point de sa tête ces quatre têtes qu’il avait sauvées ; et, grâce à la prise du Saint-Bernard, du Valaisan et du mont Cenis, on lui pardonna cet attentat patriotique.

Seulement, le nom de monsieur de l’Humanité, devenu plus applicable que jamais, lui fût plus que jamais appliqué.

J’ai déjà dit que mon père avait du bonheur.


V


Suites du coup d’épée au front. — Saint-Georges et les chevaux de remonte. — Querelle que lui cherche mon père, — Mon père passe à l’armée de Sambre-et-Meuse. — Il donne sa démission et revient à Villers-Cotterets. — Il est rappelé à Paris pour faire le 13 vendémiaire. — Bonaparte le fait à sa place. — Attestation de Buonaparte. — Mon père est envoyé dans le pays de Bouillon, puis nommé commandant de place à Landau. — Il retourne comme général divisionnaire à l’armée des Alpes. — Le sang et l’honneur anglais. — Bonaparte nommé général en chef de l’armée d’Italie. — Campagne de 1796.

Du moment où on ne le guillotinait pas, mon père était enchanté de se retrouver à Paris.

Depuis quelque temps, il lui était poussé une loupe au front, laquelle lui donnait d’effroyables maux de tête. Cette loupe lui était venue à la suite de ce coup de pointe qu’il avait reçu dans un des trois duels qu’il avait eus au régiment pour soutenir la prééminence de la Reine sur le Roi. Il en résultait que la loupe était adhérente au crâne et que son extirpation présentait quelque danger.

L’opération fut faite avec beaucoup de bonheur par M. Pelletan.

Le 15 thermidor de la même année, un arrêté du comité de salut public nomma mon père commandant de l’École de Mars établie au camp des Sablons.

Ce commandement ne fut pas de longue durée.

Le 18 thermidor, c’est-à-dire trois jours après cette nomination, il fut envoyé à l’armée de Sambre-et-Meuse.