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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 10.djvu/150

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

piastres (cent vingt-cinq francs) par mois lui avait été allouée, dès son arrivée à Rome, sur les fonds de la propagande. Son beau-frère Drack, recommandé par le baron Mortier à la duchesse de Berry, avait été nommé par elle bibliothécaire du duc de Bordeaux. C’est alors que le pape fit entrer, comme pensionnaire au couvent des Saints-Apôtres, Deutz, qui continuait d’affecter en public la même dévotion. Cependant, ceux qui vivaient dans son intimité avaient jugé bien vite dans quel but d’intérêt il avait fait son abjuration. La plupart de ses premiers protecteurs, se voyant joués par lui, l’abandonnèrent peu à peu ; il ne lui resta bientôt plus que l’appui du cardinal Capellari, qui, ne le voyant que rarement, conservait pour lui le même intérêt.

En 1830, Deutz, sous prétexte qu’il ne voulait plus vivre d’aumônes, obtint de Pie VIII, le pape alors régnant, trois cents piastres avec lesquelles il partit, pour établir, disait-il, un commerce de librairie à New-York.

Après avoir mangé les fonds de ses livres, il revint en Europe, et arriva à Londres dans l’automne de 1831. Il était recommandé aux jésuites établis en Angleterre, et se présenta chez M. l’abbé Delaporte, aumônier de la chapelle des émigrés et légitimistes français, qui le mit en rapport avec M. le marquis Eugène de Montmorency, alors résidant à Londres. Deutz se faisait remarquer par une assiduité extraordinaire aux offices de la chapelle, priant avec ferveur et communiant fréquemment ; il capta ainsi la bienveillance de M. de Montmorency, homme très-religieux, qui l’admit à sa table, et même à une espèce d’intimité.

À cette époque, madame de Bourmont se disposait à aller, avec ses filles’rejoindre son mari en Italie. M. de Bourmont lui recommanda Deutz comme un homme sage, honnête, qui pouvait vui être utile dans son voyage, et dévoué, d’ailleurs, corps et âme à la légitimité et à la religion. Deutz fît donc le voyage avec madame de Bourmont, et se conduisit de telle sorte qu’à son arrivée, cette dame le recommanda à son tour avec chaleur à la duchesse de Berry. Lorsque la princesse passa à Rome, le pape lui parla aussi de Deutz comme d’un