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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

Le même soir, les deux auteurs avaient d’une façon inattaquable leurs entrées dans les coulisses.

Mademoiselle Florival ne se montra pas plus sévère que l’administration, et donna aux deux auteurs leurs entrées chez elle. Ils en profitèrent conjointement, et sans jalousie aucune. L’amitié de Desforges et d’Eugène Sue eût servi de modèle, nous l’avons dit, à celle de Damon et de Pythias.

Vers le mois de juin 1825, Pythias et Damon se séparèrent. Eugène Sue resta seul en possession de ses entrées au théâtre et chez mademoiselle Florival. Desforges partit pour Bordeaux ?

Pourquoi Desforges allait-il à Bordeaux ?

Il croyait tout simplement aller voir un ami : il allait fonder un journal. Les voies de la Providence sont mystérieuses et profondes !

Cet ami s’appelait-Tessier ; le journal s’appela le Kaléidoscope.

Desforges croyait passer un jour ou deux avec son ami. Tessier le conduit chez un libraire où non-seulement on vendait des livres, mais encore où l’on faisait de la littérature. — C’était chez lui, dans son u^gasin, situé, je crois, rue Espritdes-Lois, que se tenait l’hôtel Rambouillet de Bordeaux. — Le voyageur trouve là huit ou dix jeunes gens avides de ce souffle parisien qui porte au monde entier le pollen littéraire.

— Ah ! si nous avions un journal ? disaient-ils, si nous avions surtout quelqu’un pour le fonder ?

— Eh bien, mais me voilà ! répondit Desforges.

Et, en effet, à la suite de cette réunion, grâce à Desforges, le Kaléidoscope fut fondé.

C’est ainsi que s’éparpillaient les missionnaires de la foi nouvelle, qui préparaient le grand mouvement littéraire de 1827, 1828 et 1829.

Desforges, qui ne me connaissait que de nom à cette époque, non pas par mon nom littéraire, — je n’en avais pas,

— mais par mon nom d’enfant, qu’il avait entendu dire chez M. Collard, ce bon et excellent tuteur dont j’ai eu occasion de parler dans ces Mémoires, mit dans le Kaléidoscope.