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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 2.djvu/274

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

avant, soit pendant, soit après la bataille, de nous rendre le service que je suis chargé de vous demander.

Maubreuil secoua la tête.

— Refusez-vous ? demanda vivement Roux-Laborie.

— Non pas. Je songeais seulement que cent hommes, c’est difficile à trouver ; heureusement, il n’est pas besoin de cent hommes : douze suffiront. Je les trouverai peut-être dans l’armée ; mais il me faudrait alors la faculté de les faire avancer de deux ou trois grades, et de leur accorder des récompenses pécuniaires, en harmonie avec le service qu’ils auront rendu.

— Vous aurez tout ce que vous voudrez. Que nous importent dix ou douze colonels de plus ou de moins !

— C’est bien.

— Vous acceptez alors ?

— Probablement… Cependant je demande jusqu’à demain pour réfléchir.

Et Maubreuil sortit, suivi de Roux-Laborie, très-inquiet du sursis demandé. Mais Maubreuil le rassura, en prenant l’engagement de lui donner une réponse positive le lendemain.

On comprend l’hésitation de Maubreuil ; il avait été introduit dans le cabinet du prince, il s’était assis dans le fauteuil du prince, mais, au bout du compte, il n’avait pas vu le prince.

Or, quand on joue sa tête pour un autre, on aime assez à voir celui pour lequel on tient les cartes.

Le lendemain, on revient à l’hôtel.

Maubreuil accepte.

Roux-Laborie respire.

— Mais, ajoute Naubreuil, à une condition.

— Laquelle ?

— Je ne me regarde pas comme suffisamment autorisé par votre seule parole. J’ai besoin que les promesses que vous me faites soient solidement garanties. Je veux voir M. de Talleyrand lui-même, et recevoir de lui ma mission.

— Mais, mon cher Maubreuil, vous comprenez combien il est difficile…