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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 3.djvu/161

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

et personnages, que je verrais enterrer Philippe, que je verrais mourir madame Dorval, que je verrais couronner Moessard ?

Il y avait aussi, dans ce prologue, causant avec l’ange du mariage, un ange de la lune, s’appelant, de son nom d’ange, Ithuriel, de son nom de femme, mademoiselle Denotte. — Celle-là, est-elle morte ou vivante ?… Je n’en sais rien.

L’exposition se faisait entre l’ange du mariage et l’ange de la lune, deux anges qui, portant les mêmes armoiries, pourraient bien être de la même famille.

Malvina s’était égarée à la chasse ; l’orage, l’avait poussée dans la grotte de Staffa. Là, surprise d’un sommeil invincible, elle s’était endormie sur un tombeau. L’ange du mariage veillait sur elle.

L’ange de la lune, qui, sur un rayon de la pâle déesse, avait glissé à travers les gerçures du plafond basaltique, demandait à l’ange du mariage la cause de sa présence, et surtout celle de la présence de cette jeune fille dans la grotte de Staffa.

L’ange du mariage répondait, alors, que Malvina, sœur de lord Aubray, devant épouser le lendemain le comte de Marsden, il avait été appelé par la solennité de la circonstance, et que la façon dont il regardait la belle fiancée, quand Ithuriel l’avait surpris au milieu de cette occupation, la tristesse qui se peignait sur sa physionomie, venaient des malheurs réservés à cette jeune fille, près de tomber des bras de l’Amour dans ceux de la Mort.

Alors, Ithuriel commençait à comprendre.

« — Explique-toi, disait Ithuriel ; serait-il vrai que d’horribles fantômes viennent quelquefois ?… »

Mon voisin tressaillit, comme si un aspic l’eût mordu au fond de  son sommeil.

Vinssent ! cria-t-il, vinssent !

Les chut ! éclatèrent par toute la salle, et, comme les autres, je me permis de réclamer le silence vivement, car j’étais intéressé par cette exposition.

L’ange de la lune, interrompu au milieu de sa phrase, jeta un regard de colère sur l’orchestre et reprit :