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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 3.djvu/42

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

Cela était baptisé du titre essentiellement nouveau de Pèlerinage à Ermenonville.

Adolphe, tout naturellement, n’en put tirer aucun parti ; il le perdit, ne le retrouva jamais, et fit bien.

Il me serait impossible de m’en rappeler un mot.

Au reste, Adolphe ne réussissait pas mieux que moi. Toutes ses espérances, à lui aussi, tombaient les unes après les autres, et il m’écrivait que nous n’arriverions jamais qu’ensemble.

Mais, pour arriver, il fallait partir ; et comment partir de Crépy pour Paris, avec l’état de mes finances, qui ne s’élevait jamais — dans mes beaux jours de recettes maternelles — au delà de huit ou dix francs ?

Il y avait donc impossibilité matérielle.

Mais les mystères de la Providence sont infinis.

Un samedi du mois de novembre, M. Lefèvre nous annonça, à sa manière habituelle, — en ordonnant à Pierre de faire venir les chevaux pour le lendemain sept heures du matin, — un de ses voyages mensuels à Paris.

Presque en même temps qu’il donnait cet ordre, à la fin du dîner, comme d’habitude encore, la cuisinière entra et annonça qu’un de mes amis me demandait.

Je sortis. C’était Paillet, mon ancien maître clerc ; comme moi, il avait quitté maître Mennesson.

Il habitait momentanément sa ferme de Vez, où il avait un logement au haut d’une tour près de laquelle la tour de madame Marlborough, si célèbre qu’elle soit, est bien peu de chose.

C’est, en effet, une tour merveilleuse, que cette tour de Vez, reste inébranlable de quelque château fort du xiie siècle ; vieux nid de vautour, habité aujourd’hui par les corbeaux.

Paillet était venu à cheval, pour savoir le prix des grains, je crois. Il était bien, de temps en temps, premier clerc en province ou second clerc à Paris ; mais son état réel, son véritable état, était d’être propriétaire.

Nous allâmes faire un tour du côté des remparts.

J’étais en train de lui conter toutes mes douleurs, auxquelles