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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 3.djvu/45

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

où l’on me connaît ; une fois à Paris, je ne suis donc pas inquiet.

— Alors, est-ce dit ?

— Ma foi, oui !… ce sera drôle.

— Partons-nous pour Paris ?

— Nous partons.

— Eh bien, alors, mieux que cela ; au lieu de partir demain, partons ce soir ! Nous irons coucher à Ermenonville, et, demain soir, en partant de bon matin d’Ermenonville, nous pouvons être à Paris.

Partons ce soir.

Nous rentrâmes : Paillet, à l’hôtel, pour faire seller son cheval ; moi, chez maître Lefèvre, pour prendre mon fusil, et m’habiller en chasseur.

Une chemise, une redingote, un pantalon et une paire de bottes, furent envoyés par l’intermédiaire du troisième clerc à Paillet, qui en bourra un portemanteau ; après quoi, j’allai, mon fusil sur l’épaule, attendre Paillet à l’extrémité de la ville.

Paillet parut bientôt.

Il était trop tard pour chasser ; nous ne songeâmes tous deux qu’à gagner du pays. Je sautai en croupe.

Deux heures après, nous étions à Ermenonville.

C’était la deuxième ou troisième fois que je venais à l’hôtel de la Croix ; autant que je puis me le rappeler, je n’étais pas une excellente pratique ; mais, enfin, je n’y avais pas de mauvais antécédents, au contraire.

Nous fûmes bien reçus.

Une omelette, une bouteille de vin et du pain à discrétion constituèrent notre souper.

Le lendemain, notre compte, cheval compris, se montait à six francs ; restaient vingt-neuf.

Nous nous regardâmes, Paillet et moi, d’un air qui voulait dire : « Hein ! comme cela s’en va, l’argent ! » Et, après deux ou trois mouvements de tête des plus philosophiques, nous nous remîmes en route, piquant droit sur Dammartin, où nous devions déjeuner.