Aller au contenu

Page:Dumas - Mes mémoires, tome 3.djvu/6

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
3
MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

Puis, le prenant, l’examinant avec soin et le posant sur son bureau :

— Maintenant, dit Louis XVIII, envoyez à la Bibliothèque royale quelqu’un de qui vous soyez sûr ; cette personne demandera les Œuvres de saint Augustin, édition de 1669, et, au tome VII, entre les pages 404 et 405, elle trouvera une feuille de papier.

— Mais, sire, demanda M. Decazes, au lieu de confier cette mission à une autre personne, pourquoi n’irais-je pas moi-même ?

— Impossible, mon enfant !

Mon enfant était le terme d’amitié sous lequel Louis XVIII désignait son ministre favori.

On envoya un homme de confiance à la Bibliothèque royale : il ouvrit le Saint Augustin à la page dite, et trouva le papier désigné.

Rien ne lui fut plus facile que de le prendre ; ce papier était tout blanc, il avait la forme de l’in-folio ; il était d’une grande finesse, et portait de bizarres découpures.

Louis XVIII cherchait les mystérieuses révélations cachées dans les découpures de ce papier, lorsque le secrétaire du roi vint lui remettre une feuille de la même grandeur que celle du Saint Augustin, mais chargée de lettres sans ordre.

À l’angle de l’enveloppe qui renfermait cette feuille, étaient écrits ces deux mots : « Très-pressée. »

Le roi comprit qu’il y avait coïncidence entre les deux événements, analogie entre les deux feuillets. Il posa la lettre découpée sur la lettre écrite, et il vit que les lettres comprises dans les intervalles de la feuille supérieure avaient un sens.

Il congédia le secrétaire, pria M. Decazes de le laisser seul ; et, quand tous deux furent partis, il lut les lignes suivantes :

« Roi, tu es trahi ! trahi par ton ministre et par le P. P. de ton S…

» Roi, je puis seul te sauver. 

» Mariani. «