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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 3.djvu/7

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

Le lecteur comprend que je ne prends pas plus la responsabilité du billet que je mets sous ses yeux, que je ne prends celle du reste de l’anecdote.

Le roi ne parla à personne de ce billet ; seulement, le soir même, le ministre de la police[1], congédié le matin, donnait l’ordre de se mettre à la recherche du nommé Mariani.

Le lendemain, qui était le dimanche 13 février, le roi, en ouvrant son Paroissien pour lire la messe, y trouva le billet suivant :

« On a surpris ce que je t’écrivais ; on est à ma recherche. Presse-toi de me voir, si tu tiens à éviter de grands malheurs dans ta maison. Je saurai si tu veux me recevoir, au moyen de trois pains à cacheter que tu colleras intérieurement sur les carreaux des fenêtres de ta chambre à coucher. »

Le roi, quoique préoccupé de ce dernier avis, ne crut pas qu’il fût aussi urgent de s’y rendre que le disait la lettre.

Il attendit, il hésita, il remit la chose au lendemain.

Le soir, par extraordinaire, il y avait spectacle à l’Opéra. On y jouait le Rossignol, les Noces de Gamache et le Carnaval de Venise.

Le duc et la duchesse de Berry assistaient à la représentation.

Vers onze heures du soir, à la fin du second acte du ballet, la duchesse de Berry, fatiguée, témoigne à son mari le désir de se retirer. — Le prince ne veut pas la laisser sortir seule, et la reconduit.

Arrivé à sa voiture, qui stationne rue Rameau, au moment où, après avoir donné la main à la princesse pour monter sur le marchepied, il lui dit : « Attendez-moi, je ne tarderai pas à vous rejoindre, » un homme s’élance rapidement, passe comme un éclair entre le factionnaire de garde à la porte de sortie et M. de Clermont-Lodève, gentilhomme de service, saisit le prince par l’épaule gauche, l’appuie fortement contre sa poi-

  1. M. Decazes, ministre de l’intérieur, était chargé de la police.