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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 3.djvu/80

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

tenu, comme j’étais absolument de la même taille que Lecornier, qu’il écrivit à son tailleur de me faire un habit, un gilet et un pantalon.

Lecornier avait écrit ; j’avais envoyé mes vingt francs à valoir sur la fourniture, et, quinze jours après, le tailleur m’avait expédié les effets avec la facture de cent cinquante-cinq francs, sur laquelle les vingt francs que j’avais envoyés étaient portés en à-compte.

Il était convenu que le reste de la facture se payerait par vingt francs, et mois par mois.

Le tailleur se nommait Bamps, et logeait rue du Helder, no 12.

On voit, au chiffre de la fourniture, que, quoique Bamps logeât dans le quartier fashionable, ce n’était ni un Chevreuil ni un Staub ; non, c’était un industriel à prix doux, égaré hors du quartier latin, où il eût dû toujours rester.

Mais, par cela même qu’il faisait de petites affaires, Bamps avait d’autant plus besoin de leur petit produit.

Quelque économie que j’eusse appelée à mon aide, je n’avais pu, le mois suivant, mettre de côté les vingt francs promis.

Ne les ayant pas, je n’avais donc pu les envoyer.

Cette première infraction à notre traité avait inspiré des inquiétudes à Bamps. — Cependant Bamps connaissait Lecornier comme appartenant à une famille, sinon riche, du moins aisée ; Lecornier tenait, avec une exactitude scrupuleuse, ses engagements envers lui ; il devait donc attendre, avant de manifester son souci.

Le second mois arriva. Il y avait même impossibilité de ma part, et, en conséquence, redoublement d’inquiétude de la part de Bamps.

Sur ces entrefaites, j’avais quitté Crépy — on sait dans quelles circonstances — et j’étais revenu à Villers-Cotterets. Cinq ou six jours après mon départ, Bamps, de plus en plus inquiet, avait écrit à Lecornier.

Lecornier avait répondu en indiquant ma nouvelle adresse. Il en résulta qu’un jour, — vers le commencement du troisième mois depuis la fourniture, — comme je flânais sur le