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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 5.djvu/168

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

une pipe plus belle pour aller dans le monde, il n’avait qu’un brûle-gueule qu’il ne quittait jamais, qui sentait mauvais allumé et à sa bouche, mais qui, éteint et dans sa poche, sentait plus mauvais encore.

Cette condamnation fit du bruit autour du nom de Fontan. La révolution de juillet l’alla chercher à Poissy, je crois : il reparut avec une certaine popularité, la popularité passagère de la persécution.

Harel, qui était, alors, directeur de l’Odéon, eut aussitôt l’idée d’exploiter cette popularité en lui demandant une pièce.

Fontan la lui fit ; cette pièce, qui s’appelait Jeanne la Folle, tomba ou n’eut qu’un succès médiocre.

— Décidément, me dit Harel en m’abordant après la représentation, décidément, je m’étais trompé, et Fontan avait plus de prison que de talent !

C’était malheureusement vrai.

Le pauvre Fontan mourut jeune encore, sans rien laisser de remarquable ; il avait fait imprimer un volume de poésies, et représenter deux ou trois pièces, tragédies ou drames.

Quant à Barthélemy, sa condamnation était moins dure : elle consistait en trois mois de prison et mille francs d’amende.

Voici les causes du procès :

Nous avons déjà entretenu nos lecteurs des débuts de Barthélemy et Méry. Il sait comment les deux poètes se réunirent, et comment furent faitesla Villéliade, la Peyronnéide, la Corbiérèide et une foule d’autres pièces, qui, pendant deux ans, tinrent éveillée l’attention publique.

Un de ces poëmes, le plus important même de ces poèmes, fut le Napoléon en Égypte.

L’ouvrage avait obtenu un grand succès, et avait eu dix éditions en moins de six mois.

Méry, malade de l’absence du soleil, était allé chercher la chaleur et les brises maritimes, ces deux éléments opposés et qui, cependant, s’allient si bien, à Marseille. Barthélemy, resté seul, avait eu l’idée de partir pour Vienne, et d’offrir au