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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 5.djvu/259

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

Pendant le cours de la même année 1827, Cromwell fut publié. On discuta peu sur le poëme, beaucoup sur la préface, qui contenait toute une poétique nouvelle.

En 1828, vinrent les Orientales et le Dernier jour d’un condamné.

Enfin, le 16 février 1829, fut joué, comme je l’ai dit, Henri III.

La révolution poétique était à peu près faite par Hugo et par Lamartine ; mais la révolution dramatique était encore tout entière à faire.

Henri III venait franchement, hardiment, heureusement de commencer l’œuvre.

Aussi, cette représentation, que j’ai racontée dans tous ses détails, fut-elle, non-seulement une grande joie, mais encore un grand encouragement pour Hugo.

Nous nous revîmes après la représentation.

Il me tendit la main.

— Ah ! m’écriai-je, me voilà donc enfin des vôtres !

J’étais bien heureux de mon succès ; mais ce qui surtout me le rendait plus précieux, c’était le droit qu’il m’avait conquis de toucher toutes ces mains-là.

— Maintenant, me dit Hugo, à mon tour !

— Quand le jour sera venu, ne m’oubliez pas…

— Vous serez à la première lecture.

— C’est parole donnée ?

— C’est rendez-vous pris !

Et nous nous quittâmes.

En effet, dès le lendemain, Hugo choisit, parmi les différents sujets arrêtés d’avance dans son esprit, le drame de Marion Delorme.

Puis, comme nous faisons, nous autres créateurs, il la porta quelque temps dans son cerveau, ainsi que la mère porte l’enfant dans son sein.

Puis, enfin, il se dit un jour :

— Le 1er juin 1829, je commencerai mon drame.

Le 1er juin arrivé, il le commença, en effet.

Le 19, il avait fait les trois premiers actes.