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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 5.djvu/26

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

Puis, revenant à moi :

— Eh bien, non, on ne t’en fera pas, d’injustice ; eh bien, non, on ne te donnera pas plus de besogne qu’aux autres ; seulement, on t’en donnera autant, et on veillera à ce que tu la fasses ! et c’est M. Fossier que je chargerai de cette inspection.

Je fis un mouvement de lèvres.

— Ah çà ! as-tu quelque chose contre M. Fossier, à présent ?

— Non ; je le trouve laid, voilà tout.

— Eh bien, après ?

— Eh bien, j’aimerais mieux qu’il fût beau, pour lui d’abord, pour moi ensuite.

— Mais que t’importe que M. Fossier soit laid ou beau ?

— Quand j’ai affaire trois ou quatre fois par jour à un visage, j’aime mieux qu’il soit agréable que désagréable.

— Mais qui m’a donc bâti un j…-f… pareil ? vous verrez qu’il faudra lui faire des chefs de bureau à son goût… Allons, allons ! va-t’en à ton cabinet, et tâchons de réparer le temps perdu.

— J’y vais ; mais, auparavant, une promesse, monsieur.

— Je crois qu’il va m’imposer des conditions, ma parole d’honneur !

— Celle-là, vous l’accepterez, j’en suis sûr.

— Voyons, que désirez-vous, monsieur le poëte ?

— Je désire que, chaque jour, vous vous assuriez par vous même, et de la besogne que j’aurai faite, et de la façon dont elle sera faite.

— Eh bien, je te le promets… Et à quand ta première représentation ?

— Il me serait difficile de vous le dire ; mais, ce dont je puis vous répondre, c’est que vous y serez.

— Oui, j’y serai, et plutôt avec deux clefs qu’une, sois tranquille… Ainsi, tiens-toi bien !

Et il me fit un geste de menace sur lequel je sortis.

M. Deviolaine me tint parole. Il me distribua une large besogne, mais sans me surcharger.

Seulement, comme il me l’avait promis, M. Fossier venait