— Dame ! vous voyez, vous entendez… Réfléchissez, mon cher.
— C’est tout réfléchi.
— Alors, vous venez ?
— Certainement.
Je me retournai vers Hutin.
— Alors, tu viens ?
— Parbleu !
— C’est tout ce qu’il faut.
Je levai mon verre.
— Mes amis, à demain soir, ici !… Père Cartier, un dîner pour vingt personnes, à la condition qu’on le mangera, que nous soyons vivants ou morts. Voici deux cents francs pour le dîner !
— Tu payeras demain.
— Et si je suis fusillé ?…
— Eh bien, c’est moi qui payerai.
— Vive le père Cartier !
Et j’avalai le contenu de mon verre.
On répéta en chœur : « Vive le père Cartier ! » et, comme nous avions soupé, comme il était onze heures, comme les chevaux étaient au cabriolet, nous nous levâmes pour partir.
— Ah diable ! un instant, fis-je en réfléchissant ; nous pouvons avoir affaire demain à de plus rudes adversaires que le père Levasseur ; chargeons sérieusement les pistolets. Qui de ces messieurs a des balles de calibre ?
C’étaient des pistolets du calibre vingt-quatre.
C’eût été un grand hasard de trouver des balles de ce calibre-là.
— Attends, dit Cartier, je vais t’arranger cela, moi. Tu as des balles dans ta poche ?
— Oui, mais du calibre vingt.
— Donne-m’en quatre ; ou plutôt huit ; il est bon d’en avoir de rechange…
Je lui donnai huit balles.
Cinq minutes après, il me les rapporta allongées en lingots, et, par conséquent, entrant dans les pistolets.