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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 6.djvu/232

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

de poudre qu’il y a dans le magasin, et je reviens vous en instruire.

Et je saluai et je sortis.

En sortant, je jetai les yeux sur le schako du factionnaire.

Il portait le chiffre du 53e.

Je jouais de bonheur. Comme on voit, la garnison de Soissons était composée du dépôt du 53e, et le 53e, on se le rappelle, avait tourné du côté du peuple au moment même où l’on s’emparait du Louvre.

Dans la rue, je rencontrai un officier.

— Vous êtes M. Dumas ? me dit-il.

— Oui, monsieur.

— C’est vous qui venez de mettre le drapeau tricolore sur la cathédrale ?

— Oui, monsieur.

— Marchez et ne craignez rien de nous ; les soldats se sont distribué hier des cartouches tricolores.

— Puis-je compter sur eux ?

— Vous pouvez compter qu’ils resteront dans la caserne.

— Votre nom ?

— Le lieutenant Tuya.

— Merci !

Je pris le nom du lieutenant Tuya sur mon portefeuille.

— Que faites-vous ? me demanda-t-il.

— Qui sait ? répondis-je ; si, en rentrant à l’hôtel de ville, je trouvais une seconde épaulette, vous ne m’en voudriez pas de vous l’envoyer ?

Il se mit à rire, me fit un signe de tête, et s’éloigna rapidement.

En ce moment, plus rapidement encore, je vis passer près de moi l’officier que j’avais trouvé chez le commandant de place.

Il n’y avait pas de temps à perdre : sans doute, il allait porter des ordres. J’allongeai le pas, de mon côté ; en un instant, je fus à la poudrière.

Je frappai à la porte en me nommant.

— C’est vous ? me dit Bard.