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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

Tout en dialoguant, nous étions arrivés à la porte de la rue.

M. Jousselin continuait de crier ; la populace s’amassait.

Je revins sur mes pas.

— Ah ! taisons-nous un peu, monsieur l’entreposeur, lui dis-je en empoignant solidement le manche de la hache.

— Au meurtre ! à l’assassin ! hurla-t-il de plus belle.

Et, me fermant la porte au nez, il la verrouilla en dedans.

Je ne voulais pas m’amuser à enfoncer la porte de M. l’entreposeur.

— Allons, allons, dis-je à M. Quinette, l’ennemi quitte la place ; en route !

Et je me mis à courir, la hache à la main, du côté de l’église Saint-Jean.

Je n’avais pas fait cent pas, que je reconnus la voix de M. Jousselin, dont les malédictions m’arrivaient à travers l’espace.

Il était à sa fenêtre, et essayait d’ameuter la population contre moi.

M. Quinette avait prudemment disparu.

Je ne l’ai revu qu’en 1851, à Bruxelles. — Si, à Soissons, je trouvai qu’il était parti trop tôt, en revanche, à Bruxelles, il me sembla qu’il restait trop tard, quand, après le 2 décembre, il attendit qu’on lui envoyât sa démission d’ambassadeur de la République…

Je ne m’inquiétai ni des cris de l’entreposeur, ni de l’attitude hostile de la population ; je continuai mon chemin vers la poudrière.

Cette fois, Bard était à son poste.

— Eh bien, me demanda le lieutenant-colonel d’Orcourt, avez-vous l’autorisation de M. Jousselin ?

— Non, répondis-je ; mais j’ai la clef de la poudrière !

Et je montrai la hache.

En ce moment, Hutin arriva.

— Eh bien, lui dis-je, votre docteur Missa, qu’a-t-il fait ?

— Comprenez-vous ! me répondit Hutin, ce chef des pa-