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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 7.djvu/152

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

Le 18 octobre, des placards affichés pendant la nuit couvrirent de menaces les murailles du Luxembourg.

Deux ou trois bandes de ces hommes qu’on ne retrouve que dans les jours néfastes sortirent, pour ainsi dire, des catacombes, et sillonnèrent la ville en chantant la Parisienne, et criant : « Mort aux ministres ! » L’une d’elles faisait plus que crier ; elle portait un drapeau sur lequel était écrit en grosses lettres ce vœu sanglant.

Cette bande partit du Panthéon, traversa le pont Neuf, et se dirigea droit sur le Palais-Royal.

Il y avait conseil des ministres. Au bruit, aux cris, aux rumeurs qui emplissaient la place comme le jour où l’on y plantait, au bout d’une pique, la tête de la princesse de Lamballe, le roi et M. Odilon Barrot s’avancèrent jusque sur le bord de la terrasse.

Le peuple ne poussa pas un seul cri de « Vive le roi ! » mais cria à tue-tête : « Vive Odilon Barrot ! »

M. Odilon Barrot était fort embarrassé de cette popularité qui contrastait si publiquement avec l’impopularité du roi.

Louis-Philippe se mit à rire.

— Oh ! ne vous préoccupez pas de ces cris, monsieur Barrot, dit le roi ; en 1792, j’ai entendu les pères de ces mêmes hommes crier : « Vive Pétion ! » comme eux crient aujourd’hui : « Vive Barrot ! »


CLXXIII


Oudard m’annonce que Louis-Philippe désire me voir. — Visite à M. Deviolaine. — Hutin, garde à cheval surnuméraire. — Mon entretien avec le roi sur la Vendée et la politique du juste milieu. — Bixio artilleur. — Il se charge de me faire admettre dans sa batterie. — J’envoie ma démission à Louis-Philippe.

C’était au milieu de tous ces troubles que j’étais arrivé ; et ce que je viens de dire dans le chapitre précédent, le peu d’ordre même avec lequel je l’ai dit, peint assez bien l’état étrange d’exaspération auquel étaient arrivés les esprits.