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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 7.djvu/165

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

faisait des recettes fabuleuses avec son Napoléon à Schœnbrünn.

Le souper fut un de ces bons et charmants soupers comme nous en donnait Georges, splendide reine de ces sortes de fêtes, où, avec ses mains de déesse, elle servait les plus beaux fruits de Chevet.

Quant à l’esprit, ou ne pouvait rien avoir de mieux : Harel, Janin, Lockroy.

Nous étions encore à table à trois heures du matin.

Cependant, une chose m’inquiétait : il y avait dans l’atmosphère de ces signes qui indiquent une conspiration ; des coups d’œil se croisaient, des sourires se répondaient, des demi-mots s’échangeaient.

Quand je demandais des explications, tout le monde se regardait d’un air étonné ; on riait à ma barbe ; j’avais l’air d’arriver de Carpentras.

Il est vrai que j’arrivais de Quimper, ce qui était à peu près la même chose.

On se leva de table. Georges m’emmena dans sa chambre sous prétexte de me montrer quelque chose de très-beau. Que me montra-t-elle ? Je ne saurais trop le dire ; seulement, ce qu’elle me montra était si beau, que je fus plus d’un quart d’heure à revenir dans le salon.

Quand j’y revins, Lockroy et Janin avaient disparu. Harel seul restait.

Trois heures et demie venaient de sonner ; je pensai qu’il était temps de me retirer, je pris mon chapeau, et voulus sortir par où j’étais entré.

— Non, non, me dit Harel, tout le monde est couché… Suivez-moi par ici.

Je le suivis sans défiance.

Nous traversâmes de nouveau la chambre de Georges, puis un cabinet de toilette ; puis, enfin, nous entrâmes dans une chambre que je ne connaissais pas.

Deux bougies brûlaient sur une table chargée de livres de toutes les dimensions, de plumes de toute sorte. Un excellent lit dont la couverture était faite resplendissait dans l’om-