Le roi se fit attendre, contre son habitude.
En entrant dans le cabinet, il n’aperçut pas Dupont (de l’Eure), qui causait dans un coin avec M. Bignon.
— Victoire, messieurs ! cria-t-il d’une voix triomphante ; la retraite de M. le préfet de la Seine est décidée, et, comprenant l’opportunité de cette retraite, le général la Fayette lui-même y donne la main.
— Plaît-il, sire ? dit vivement Dupont (de l’Eure) sortant de l’ombre et rentrant dans le cercle de lumière qui le faisait visible aux yeux du roi.
— Ah ! c’est vous, monsieur Dupont, reprit le roi un peu embarrassé. Eh bien, je dis que le général la Fayette cesse de s’opposer à ce que M. Barrot se retire.
— Sire, répondit Dupont (de l’Eure), ce que vous me faites l’honneur de me dire là me paraît tout simplement impossible.
— Je l’ai entendu de la bouche même du général, monsieur, répliqua le roi.
— Que le roi me permette de croire à une erreur de sa part, insista Dupont (de l’Eure) en s’inclinant ; mais le général m’a tenu à moi-même un langage tout opposé, et je ne le crois pas capable de se contredire à ce point.
Un éclair passa sur le visage du roi ; cependant il se contint.
— Au reste, continua Dupont (de l’Eure), ne parlons que pour moi-même… Puisque M. Odilon Barrot se retire, je renouvelle au roi la prière de vouloir bien accepter ma démission.
— Mais, monsieur, dit vivement le roi, ce matin, ce matin même, vous m’avez promis, quelque chose qui arrivât, de rester jusqu’au procès des ministres.
— Oui, c’est vrai, sire, mais à la condition que M. Barrot resterait.
— Sans condition, monsieur.
Ce fut au visage de Dupont (de l’Eure) de se couvrir de rouge à son tour.
— Cette fois, sire, dit-il avec la fermeté de la conviction, j’affirme que le roi est dans l’erreur.
— Comment ! monsieur, s’écria le roi, vous me donnez un