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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 7.djvu/227

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

Tu vas crouler ! point de flambeau qui puisse
Guider la foule à travers tes débris :
Où courons-nous ? Quel sage en proie au doute
N’a sur son front vingt fois passé la main ?
C’est aux soleils d’être sûrs de leur route ;
Dieu leur a dit : « Voilà votre chemin ! »

Puis vient l’heure où tout ce chaos se débrouille, où toute cette nuit se dissipe, où l’aurore d’un nouveau jour se lève ; le poëte jette un cri de joie : il voit, il a vu !

Qu’a-t-il vu ?

Oh ! ne craignez rien ; il ne se fera pas prier pour vous le dire :

Toujours prophète, en mon saint ministère,
Sur l’avenir j’ose interroger Dieu.
Pour châtier les princes de la terre,
Dans l’ancien monde un déluge aura lieu.
Déjà près d’eux, l’Océan, sur les grèves,
Mugit, se gonfle, il vient… « Maîtres, voyez,
Voyez ! » leur dis-je. Ils répondent : « Tu rêves ! »

Ces pauvres rois, ils seront tous noyés !
 

« Un océan ! quel est-il, ô prophète ? »
Peuples, c’est nous, affranchis de la faim,
Nous, plus instruits, consommant la défaite
De tant de rois, inutiles, enfin !…
Dieu fait passer sur ces fils indociles
Nos flots mouvants, si longtemps fourvoyés ;
Puis le ciel brille, et les flots sont tranquilles.
Ces pauvres rois, ils seront tous noyés !

Ainsi, on le voit, ce n’est plus, comme dans les Deux Cousins, un simple revirement de fortune, un simple changement de dynastie, c’est le renversement de toutes les dynasties que prédit le poëte ; ce n’est plus, comme dans le Dieu des bonnes gens, les destins et les flots qui sont changeants ; non : ce