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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 7.djvu/320

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c’est un des biens qui nous procurent le plus de joie dans la médiocrité ! »

» Je regrette, monsieur, de ne pouvoir pousser plus loin les citations ; mais je tiens à deux choses : la première, à vous répondre poste pour poste, et la seconde, en vous répondant poste pour poste, à vous prouver que, lorsque j’applique une épithète quelconque à un homme de la valeur de Béranger, c’est que j’ai la conviction, non-seulement instinctive, mais encore raisonnée, que cette épithète lui convient.

» J’espère donc que vous aurez l’obligeance d’écrire sur votre dictionnaire de l’Académie, en marge de la très-fausse définition donnée par la docte assemblée du mot épicurien, ces mots, qui lui serviront de correctif :

« Sectateur d’Épicure, c’est-à-dire philosophe professant qu’un ami » est le premier des biens que puisse nous accorder le ciel ; que la médiocrité de la fortune est une des conditions de la sagesse ; que la sobriété est la base la plus solide de la santé, et qu’enfin il est impossible de vivre, non-seulement honnêtement, mais encore agréablement, ici-bas, sans la prudence, l’honnêteté et la justice. — Nota. Les épicuriens ne buvaient qu’un setier de vin par jour, et, le reste du temps, se désaltéraient avec de l’eau pure. Épicure, les jours de gala, mangeait sur son pain, — que, les autres jours, il mangeait sec, — un peu de fromage cythridien. »

» Et, ce faisant, monsieur, vous serez arrivé à avoir vous-même et vous contribuerez à donner aux autres une idée un peu plus exacte de l’illustre philosophe dont j’ai eu, à votre avis, le malheur de dire que notre grand chansonnier était le disciple.

» Il me reste, en terminant, à vous remercier, monsieur, de votre lettre, qui, malgré l’acrimonie de certaines phrases, me paraît, au fond, inspirée par un bon sentiment.

» Veuillez agréer mes salutations empressées.

» Alex. Dumas.
» Bruxelles, 7 septembre 1853. »

NOTE B

Les premiers volumes de mes Mémoires étaient en cours de publication dans le journal la Presse, et des personnes, probablement peu bienveillantes pour moi, et à coup sûr très-mal informées, avaient dit à Béranger que, dans le chapitre de ces Mémoires qui lui était consacré