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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 7.djvu/44

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

Ils étaient chargés, en outre, de mettre sur pied tous les tambours de leur connaissance, et de leur faire battre le rappel.

De là le tapage infernal qui venait de réveiller Paris.

Il y avait, en ce moment, à la disposition du gouvernement, un homme sur le courage duquel on pouvait compter ; c’était le général Pajol.

Le général Pajol était le vrai type du soldat. : courage, honneur, franchise, loyauté, spontanéité dans la décision, persistance dans la volonté, il avait tout.

Je ne sais à quelle bataille, colonel ou chef d’escadron d’un régiment, comme il était sous les yeux de l’empereur, un obus entra dans le ventre de son cheval, et y éclata.

Pajol sauta à quinze pieds de hauteur.

Napoléon vit l’étrange ascension à laquelle il se livrait.

— Pardieu ! dit-il, si ce b…-là en revient, il aura l’âme chevillée dans le corps !

Quinze jours après, un officier supérieur, boitant légèrement, se présente devant l’empereur.

— Qui êtes-vous ? demande Napoléon.

— Je suis le b… qui a l’âme chevillée dans le corps, lui répondit Pajol.

De là un avancement rapide dans une admirable carrière militaire qu’était venu interrompre Waterloo.

Pajol faisait de l’opposition ; Pajol était même presque républicain.

Trois jours auparavant, au moment où la Chambre jetait les premiers fondements d’une monarchie nouvelle, Pajol, qui voyait la tournure que prenaient les choses, suivait tristement la rue de Chabrol, en compagnie de Degousée, qui lui-même déplorait la voie où l’on poussait la révolution.

Tout à coup Pajol s’arrête.

— Vous me disiez, il y a un instant, que vous meniez à l’attaque du Louvre des hommes dévoués ? demanda-t-il.

— Sans doute.

— Eh bien, pouvez-vous toujours compter sur ces hommes ?

— Je le crois.