Aller au contenu

Page:Dumas - Mes mémoires, tome 7.djvu/75

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
72
MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

J’en fus pour mon frissonnement : ce papier était une copie et non un original.

Voici ce qu’il contenait :

1er novembre 1790.

» Je ne sais, monsieur, à quoi vous employez le temps et l’argent que je vous envoie. Le mal empire ; l’Assemblée détache toujours quelque chose du pouvoir royal. Que restera-t-il si vous différez ? Je vous l’ai dit et écrit souvent : ce n’est point avec des libelles, des tribunes payées et quelques malheureux groupes soudoyés que l’on parviendra à écarter Bailly et la Fayette ; ils ont excité l’insurrection parmi le peuple, il faut qu’une insurrection les corrige à n’y plus retomber. Ce plan a, en outre, l’avantage d’intimider la nouvelle cour, et de décider l’enlèvement du soliveau ; une fois à Metz ou à Péronne, il faudra qu’il se résigne. Tout ce que l’on veut est pour son bien ; puisqu’il aime la nation, il sera enchanté de la voir bien gouvernée. — Envoyez au bas de cette lettre un récépissé de deux cent mille francs.

» Louis-Stanislas-Xavier. »

— Ah ! oui, dis-je, je commence à comprendre… Mais pourquoi la copie seulement, et non l’original ?

— Parce que cet original, à la possession duquel j’attribue mon impunité, est à Londres, dans les mains d’un de mes amis, grand amateur d’autographes, qui regarde celui-là comme très-précieux, et qui ne le perdra pas, j’en suis sûr, tandis qu’en France, ajouta le général en souriant, vous comprenez… Il pourrait se perdre.

J’entendais à merveille. Je mourais d’envie de demander au général la permission de prendre une copie de cette copie.

Je n’osai.

Tout à l’heure je dirai comment je donne aujourd’hui cette copie au lecteur.

Le général replia la lettre, la remit dans le portefeuille et réintégra le portefeuille dans le secrétaire.