— Je t’aimais bien aussi ; tu étais près de mon cœur… Va, trahis-moi !
— Je m’arracherais plutôt le sein !… Pardonnez-moi, madame ; mon âme est trop pleine, je ne suis plus maître de moi !
— Cher enfant ! excellent cœur !
— Laisse-moi !… Les murs ont des yeux… Laisse-moi… (Elle se dégage.) Aime-moi toujours ainsi ; sois toujours aussi fidèle ; la plus belle récompense t’attend ! (Elle sort.)
— La plus belle récompense ! Dieu, laisse-moi vivre jusque-là !… Si mon père me disputait cette place, je le tuerais !
weislingen. — Frantz !
frantz. — Monseigneur !
— Exécute ponctuellement mes ordres : tu m’en réponds sur ta vie. Remets-lui cette lettre ; il faut qu’elle quitte la cour, et se retire dans mon château à l’instant même. Tu la verras partir, et aussitôt tu reviendras m’annoncer son départ.
— Vos ordres seront suivis.
— Dis-lui bien qu’il faut qu’elle le veuille… Va !
(Adélaïde tient à la main la lettre de son mari apportée par Frantz.)
Adélaïde. — Lui ou moi !… L’insolent ! me menacer ! Nous saurons le prévenir… Mais qui se glisse dans le salon ?
FRANTZ, se jetant à son cou. — Ah ! madame ! chère madame !…
— Écervelé ! si quelqu’un t’avait entendu !
— Oh ! tout dort !… tout le monde dort !
— Que veux-tu ?
— Je n’ai point de sommeil : les menaces de mon maître… votre sort… mon cœur…
— Il était bien en colère quand tu l’as quitté ?
— Comme jamais je ne l’ai vu ! « Il faut qu’elle parte pour mon château ! a-t-il dit ; il faut qu’elle le veuille ! »
— Et… nous obéirons ?
— Je n’en sais rien, madame.