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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 8.djvu/224

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

— Parce que je viendrai au rendez-vous avec le prologue fait… Ce qui est fait n’est plus à faire.

— Bon ! vous aurez votre plan demain.

— Oh ! que je l’aie au moment de mon départ, c’est tout ce qu’il faut : si je l’avais demain, je le ferais après-demain, et cela jetterait du trouble dans le drame que je fais.

— Soit ; je vais le tenir prêt.

— Ah ! à présent, une grâce…

— Laquelle ?

— Ne parlons plus de Richard Darlington : j’y penserai assez sans en parler, soyez tranquille.

— N’en parlons plus.

Et, en effet, à partir de ce moment-là, il ne fut pas plus question entre nous de Richard Darlington, je ne dirai pas que s’il n’eût jamais existé, mais que s’il n’eût jamais dû exister.

En revanche, Charles VII alla son train.

Le 10 août, j’écrivais les quatre derniers vers :

Vous qui, nés sur ta terre,
Portez, comme des chiens, la chaîne héréditaire,
Demeurez en hurlant près du sépulcre ouvert…
Pour Yaqoub, il est libre, et retourne au désert !

L’ouvrage fini, je le relus. C’était, comme je l’ai dit, un pastiche plutôt qu’un véritable drame ; mais il y avait un progrès immense dans le style entre Christine et Charles VII.

Il est vrai que Christine était bien supérieure à Charles VII comme imagination et comme sentiment dramatique.

Rien ne me retenait plus à Trouville ; Beudin m’avait précédé de quelques jours à Paris. Nous prîmes congé de M. et madame de la Garenne ; nous réglâmes nos comptes avec la mère Oseraie, et nous partîmes pour Paris.

Bonnechose vint nous reconduire jusqu’à Honfleur. Il ne pouvait pas nous quitter, pauvre garçon ! on eût dit qu’il devinait que nous ne devions jamais nous revoir.

Le même soir, nous montâmes dans la diligence de Rouen.

Le lendemain, au point du jour, les voyageurs descendi-