Aller au contenu

Page:Dumas - Mes mémoires, tome 8.djvu/263

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
260
MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

Comme, au bruit de mon coup de fusil, aucun garde champêtre n’était apparu, je pris mon levraut par les pattes de derrière, et remontai tranquillement dans la patache.

La belle chose que le succès ! Tout le monde me félicita, même les plus timorés.

À trois quarts de lieue plus loin, seconde pièce le luzerne.

Nouvelle tentation, nouveau raisonnement, nouvelle adhésion.

Dès le commencement de la pièce, le chien rencontra, puis tomba en arrêt. Un vol d’une dizaine de perdreaux partit ; je lâchai mon premier coup au beau milieu de la bande : il en tomba deux ; un troisième fut abattu de mon second coup.

Cela nous faisait un rôti, sinon complet, du moins présentable.

Je remontai dans la patache au milieu des applaudissements de la caravane.

On va voir tout à l’heure que ces détails, si frivoles qu’ils puissent paraître au premier abord, ne sont pas sans importance.

J’avais bonne envie de continuer une chasse qui me semblait devoir faire le pendant de la pêche miraculeuse ; mais la nuit vint, et me força de m’en tenir à mon levraut et à mes trois perdrix.

Nous marchâmes encore deux heures. Puis nous nous trouvâmes en face d’une masse parfaitement noire.

C’était le château de M. Dupont-Delporte.

— La ! dit le conducteur, nous sommes arrivés.

— Comment, nous sommes arrivés ?

— Oui.

— C’est là le château d’Esgligny ?

— C’est là le château d’Esgligny.

Nous nous regardâmes.

— Mais tout le monde est couché, dit Bessas.

Nous allons faire une révolution, ajouta Viardot.

— Messieurs, proposa Boulanger, je crois que nous ferions bien de nous coucher dans la voiture, et de ne nous présenter que demain matin.