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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

— Eh bien ? lui dis-je après avoir lu.

— Eh bien, ne trouvez-vous pas cela superbe ?

— Magnifique !

— Mettez-moi cela dans mon rôle, alors. Faites votre exposition avec le Vésuve : l’exposition y gagnera.

— Et votre rôle aussi.

— Tiens !

— Satané banquiste, va !

Laferrière se mit à rire.

Il y a deux hommes qui possèdent pour les auteurs un grand avantage dans deux emplois bien différents, avec deux talents bien divers : l’un est Laferrière ; l’autre, Mélingue.

En effet, depuis l’heure où ils ont entendu la lecture d’un ouvrage jusqu’au moment où la toile se lève, ils n’ont qu’une préoccupation : c’est de réunir, d’agglomérer, de collectionner tout ce qui peut être utile à l’ouvrage. Pas une minute leur œil quêteur n’est distrait ; pas une seconde leur esprit ne s’égare. En marchant, en mangeant, en buvant, ils pensent à leur rôle ; en dormant, ils en rêvent.

Je reviendrai plus d’une fois, à propos de Mélingue surtout, sur cette qualité, une des plus précieuses du grand artiste.

Laferrière a en plus la ténacité.

— Eh bien, lui dis-je, c’est bon, je le ferai.

— Vous le ferez, n’est-ce pas ?

— Oui.

— Vous me le promettez ?

— Je vous le promets.

— Eh bien, alors…

— Quoi ?

— Si cela vous était égal…

— Dites.

— Vous le feriez…

— Tout de suite, n’est-ce pas ?

— Oui.

— Séance tenante ?

— Je vous en prie.