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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 9.djvu/66

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

prit ce qu’en histoire naturelle, les mulets, c’est-à-dire les animaux qui ne peuvent se reproduire, sont aux productions de la matière : ils font une espèce, mais ne font pas une race.

Cet ouvrage que Casimir Delavigne rapportait au Théâtre-Français, c’était Louis XI, — à notre avis, un de ses drames les plus médiocres, les moins étudiés comme histoire, et qui n’a dû son brevet de longévité que grâce à la faveur un peu égoïste que lui accorde un artiste qui s’entête à jouer ce rôle comme un des rares types qui lui conviennent. Ce qui vit aujourd’hui, ne vous y trompez pas, ce n’est pas Louis XI ; c’est Ligier[1].

La première représentation de Teresa était annoncée pour le 5 ou le 6 février.

En attendant, l’Odéon donnait Jeanne Vaubernier.

C’était ainsi que les auteurs avaient eu l’idée de rajeunir le nom de la comtesse du Barry, de cette pauvre femme qui n’était digne ni de sa haute prospérité, ni de sa profonde infortune, et qui, selon la belle expression de Lamartine, déshonora le trône et l’échafaud.

Les auteurs de Jeanne Vaubernier étaient MM. de Rougemont, Laffitte et Lagrange.

C’était un homme d’esprit que Rougemont, et qui eut, vers la fin de sa vie, une étrange destinée. La Duchesse de la Vaubalière lui fit une réputation septuagénaire.

C’est Rougemont qui traduisit le substantif militaire jeté par Cambronne à la face des Anglais, dans la terrible soirée de Waterloo, en cette phrase pompeuse, redondante et prétentieuse, devenue, non pas historiquement européenne, mais historiquement universelle : « La garde meurt et ne se rend pas ! »

Autant que je puis me le rappeler, le drame de Jeanne Vaubernier, tel qu’il était avec ses six tableaux, son Zamore traître et ingrat, sa prison et son bourreau, était une assez mau-

  1. Voir, dans nos Études dramatiques, une analyse critique de Louis XI.