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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 9.djvu/7

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS


Adieu ! le sort m’appelle
Vers un monde nouveau ;
Dans couchette plus belle,
J’oublirai mon berceau.
Peut-être, humble poëte
Loin de vous sera grand…
Pourtant, pauvre chambrette,
Je vous quitte en pleurant !

En effet, cet appartement qu’Escousse avait pris en remplacement de sa chambre, et où il ne s’installait point sans souffrance, le voyait rentrer, le 18 février, avec son ami Auguste Lebras, suivi de la fille de la portière, qui apportait un boisseau de charbon.

Ce charbon, il venait de l’acheter chez la fruitière voisine.

Pendant que cette femme le mesurait :

— Crois-tu qu’il y en ait assez d’un boisseau ? demanda-t-il à Lebras.

— Oh ! oui ! répondit celui-ci.

Ils payèrent, et demandèrent que le charbon leur fût apporté à l’instant même. La fille de la portière laissa, sur leur ordre, le boisseau de charbon dans l’antichambre, et sortit, sans se douter qu’elle venait de renfermer la mort avec les deux pauvres enfants.

Depuis trois jours, Escousse, pour qu’on ne mît pas d’obstacle à ce dessein arrêté, avait retiré des mains de la portière la seconde clef de son appartement.

Les deux amis se séparèrent.

Le même soir, Escousse écrivit à Lebras :

« Je t’attends à onze heures et demie : le rideau sera levé. Viens, afin que nous précipitions le dénoûment ! »

À l’heure fixée, Lebras arriva ; il n’avait garde de manquer au rendez-vous : cette fatale idée du suicide germait depuis longtemps dans son cerveau.

Le charbon était déjà allumé. Ils calfeutrèrent les portes et